A l’occasion de la fête de la Femme, THD souhaite célébrer cette journée nationale à sa manière et ce, en rendant hommage à des femmes qui ont trouvé dans les TIC leur domaine d’excellence loin de toutes les idées reçues. Et pour cause, beaucoup continuent à croire qu’uniquement les hommes peuvent travailler dans ce type de secteur régi par la testostérone.
A l’occasion de la fête de la Femme, THD souhaite célébrer cette journée nationale à sa manière et ce, en rendant hommage à des femmes qui ont trouvé dans les TIC leur domaine d’excellence loin de toutes les idées reçues. Et pour cause, beaucoup continuent à croire qu’uniquement les hommes peuvent travailler dans ce type de secteur régi par la testostérone.
Amel Saidane est une figure entrepreneuriale connue du domaine des nouvelles technologies en Tunisie. Elle a brillé lors de la dernière édition du Arab German Business Forum à Berlin, en parlant de la diversité des genres en tant qu’avantage concurrentiel pour le futur. Dynamique et pleine d’énergie, Amel Saidane a réussi à conjuguer l’entreprenariat au féminin. Son objectif demeure de libérer le potentiel de l’industrie TIC en Tunisie grâce à son projet de Startup Winnspire.
Mère de deux enfants, Amel est directrice et fondatrice de Winnspire. Elle a fini ses études universitaires à l’Université de Hannover, Allemagne, en électrotechnique puis elle a intégré Nokia Siemens Solutions ex (Nokia Siemens Networks). Après 5 ans passés chez l’équipementier allemand, Amel a rejoint Microsoft dans le poste de gestionnaire de comptes d’entreprises. «Ce sont deux grandes écoles où j’ai beaucoup appris», se rappelle-t-elle. «J’ai ainsi bénéficié d’un Master MSC en économie digitale qui m’a ouvert beaucoup d’opportunités dans le développement de ma carrière».
Mme Saidane a eu l’idée de Winnspire en se basant sur un simple constat : «On dispose en Tunisie d’un capital humain très compétent techniquement. Néanmoins, nos sociétés d’offshore trouvent toujours des difficultés pour l’acquisition de nouveaux projets et clients. L’Allemagne, par contre, dispose d’une industrie TIC en pleine émergence mais avec un manque de plus de 40 mille experts en IT selon les statistiques officielles. Grâce à mes études et mon expérience avec les allemands j’ai pu bâtir un réseau solide de connaissance là-bas. Ainsi et en combinant ces atouts, mon idée à travers Winnspire et de créer une plateforme de Nearshoring pour les SSII tunisiennes. Notre startup est donc le point de liaison entre le marché allemand et le marché tunisien».
Les entreprises allemandes sous-traitent leurs projets en Tunisie. Winnspire ne veillera pas sur la réalisation de ces projets mais plutôt sur leur point de distribution en intervenant, surtout, sur le contrôle de qualité et la composante managériale. C’est donc un consortium avec des entreprises allemandes où la logique du business se base sur la création d’un écosystème favorable à l’échange. «Il s’agit avant tout de dynamiser tout l’écosystème compte tenu des spécificités du marché allemand», remarque-t-elle. «Nous sommes en dernière ligne droite de la mise en place d’un programme national qui créera les synergies nécessaires entre les deux pays. Ce programme verra le jour sous la réserve du financement du gouvernement allemand».
Amel Saidane occupe un poste de décision dans la mosaïque des entreprises Tic tunisiennes. Mais il semble que le taux de représentation des femmes dans des postes similaires reste toujours au deçà des attentes. En effet, seulement 11% des hauts postes de responsabilité en Tunisie sont occupés par des femmes. Rien de surprenant puisque la moyenne mondiale stagne depuis 10 ans dans les 14%.
Amel Saidane
Elle commente ce fait par la complexité des tâches qu’une femme peut endurer : de la gestion de sa carrière, à la gestion de sa famille. Elle est allée encore plus loin en identifiant trois facteurs clés qui expliquent ce phénomène.
La première cause est purement féminine, selon elle. Les femmes ont tendance, en effet, à se limiter par elles-mêmes. Elles évitent de changer de poste ou même d’entreprise, par souci de stabilité. Pis : elles ne négocient pas assez pour leurs jobs (salaire, avantages, etc.).
«De plus, avoir un haut poste de décision, est conditionné par l’implication dans un large réseau de connaissances. Or, les femmes tendent à sortir du réseau pour s’occuper de leur vie privée ou familiale. Ceci est la 2ème plus grande erreur qui fait limiter la carrière des femmes dans le secteur IT», regrette-t-elle.
Quant au troisième facteur, c’est le machisme ambiant. Amel Saidane accuse directement quelques directeurs et managers de ne pas vouloir donner la chance aux femmes de réussir. «Ils procèdent rarement aux promotions et aux passages de grades. Et même s’ils le font, c’est qu’il y’a un Business Case derrière», s’insurge-t-elle.
Puis elle rajoute : «Il faut impliquer les hommes dans le débat et les sensibiliser quant aux avantages d’avoir les femmes dans les hauts postes de gouvernance dans une entreprise. Elles donnent une image plus positive à la société et elles assurent le plus souvent une meilleure satisfaction des clients que les hommes».
Mais comment une femme peut-elle gérer efficacement sa vie de famille et sa carrière professionnelle ? Ce ne sont pas là deux choses contradictoires ? Pour Mme Saidane, ce sont plutôt deux choses complémentaires. «J’ai compris cela lors d’un entretien d’embauche devant une grande dame que je respecte beaucoup. Elle m’a demandé si j’ai des enfants et si j’avais l’intention d’en avoir plus dans le futur proche», raconte-t-elle. «J’étais soucieuse pour ma carrière et je ne voulais pas qu’on me recale à cause de mes engagements familiaux. Du coup, j’ai répondu hâtivement et sans réflexion par un ‘bien sûr que non, mon rendement dans ce poste me tient beaucoup à cœur’. Elle m’a alors coupé pour me dire que j’avais tord et qu’il ne faut jamais marginaliser sa vie de famille. Chose qui, après tout, est plus que logique vu qu’on ne peut s’épanouir et être productif dans son travail si le côté personnel souffre».
Quel conseil on peut alors donner aux femmes qui souhaitent se lancer dans le secteur IT ? «Il faut s’affilier à un réseau de mentors», répond Amel Saidane. «Pour les femmes, une mentor femme pourra être encore plus bénéfique. Une autre femme d’affaires qui a réussi sa vie, vous donnera, en effet, des conseils en or qui pourront transformer votre façon de voir les choses. De toutes les façons les femmes n’ont rien à envier aux hommes dans l’IT. Levez la main, prenez le dessus, négociez pour vous-même et ayez l’esprit d’initiative. C’est comme ça que vous allez réussir mesdames !».
Marwen Dhemaid
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