Le rachat des 35% de parts d’Emirates International Telecommunications (EIT), dans l’opérateur historique Tunisie Telecom, par l’investisseur Abraaj (une opération totalement indépendante de Tunisie Telecom et de l’Etat tunisien), a été annulé à une heure où il ne manquait qu’une signature pour conclure ce marché. Les motifs? Des suspicions de mauvaise utilisation des fonds (“misusing”) qui tournent autour d’Abraaj.
Le groupe Abraaj a fait face à une polémique d’envergure. Ce fond de “private equity”, basé à Dubaï, et son fondateur ont été accusés de détournement de fonds, selon un article du New York Times paru en février. Le journal américain avait indiqué, à l’époque, que “quelques uns des 24 investisseurs du fonds, dont notamment la Banque mondiale, la Fondation Bill et Melinda Gates, demandent à savoir ce qu’Abraaj a fait des 200 millions de dollars qu’ils ont injectés et n’ont jamais été dépensés”. “Les investisseurs craignent qu’Abraaj ait utilisé, leur argent, à des fins personnelles”, a signalé le New York Times.
Faisant l’objet d’une investigation non officielle et d’une revente des parts de l’un des investisseurs (d’après Bloomberg), toutes les opérations financières ont été, donc, gelées. Aucune signature d’un quelconque accord ou contrat n’est de ce fait possible.
Notons que l’Etat tunisien était au courant de ces tractations entre EIT et Abraaj. Ceci dit, aucune notification officielle ne s’est faite de la part du partenaire émirati et aucune convocation de sa part pour un Conseil d’Administration (CA) extraordinaire ou ordinaire sur l’annonce de la revente (pour la faire valider par le CA), n’est parvenue à l’Etat tunisien.
D’après nos sources, cette convocation était en passe de se faire durant la première semaine de février, mais toute l’opération a été gelée à cause de l’affaire de suspicions de détournement de fonds et la démission du président du groupe Abraaj qui s’en est suivie.
En mars dernier, des investisseurs d’Abraaj ont exprimé leur souhait de se retirer du capital du holding. Le rachat des parts d’EIT ne pouvait aboutir puisque le montant alloué à cette transaction aurait été retiré.
Ainsi, Tunisie Telecom a évité, in extremis, une situation des plus embarrassantes si le rachat s’était officialisé avant l’éclatement de cette affaire. En effet, l’opérateur aurait pu se retrouver lié à un partenaire stratégique complètement bloqué suite à des suspicions de mauvaise utilisation des fonds (“misusing”).
Nadya Jennene