«Que ça fait plaisir de voir des Tunisiens à Barcelone. On y est peu nombreux vous savez ?», c’est avec cette phrase que Mourad Garci, jeune Tunisien de 28 ans habitant la ville catalane, nous a accueillis. Nous l’avons rencontré afin qu’il nous parle de son expérience personnelle de jeune vivant à l’étranger depuis 4 ans. C’était également l’occasion, pour nous, d’appréhender l’image de la Tunisie, après la révolution, aux yeux des Espagnols.
«J’ai suivi mes études d’une façon très classique en Tunisie : j’ai fait l’école d’architecture à Sidi Bou Saïd. Ensuite, je suis parti au Brésil grâce à l’IACE, une association internationale qui organise des programmes d’échange d’étudiants entre les pays. J’y suis donc allé pour un stage professionnel de 4 mois où j’ai travaillé comme urbaniste dans une mairie.
A mon retour à Tunis, j’ai trouvé une annonce sur un site Internet pour un poste de gestion de projet de logement dans une agence d’architecture portugaise. Mon CV a été accepté et je suis parti vivre au Portugal pendant une année et demie.
Juste après, j’ai trouvé une annonce d’emploi pour une autre société portugaise où on demandait le profil d’un responsable communication en architecture».
En quoi consiste ce travail exactement ? «C’est un poste méconnu en Tunisie. Il est pourtant très diffus dans les pays ou l’activité immobilière est importante. Cela consiste à créer des vidéos 3D des logements avant leur construction. Ce travail en 3D permet également de créer des spots publicitaires pour les télés. Malheureusement, le domaine de l’immobilier en Tunisie n’est pas encore à point. Au Maroc, par contre, ce métier est carrément nécessaire. C’est la raison pour laquelle la boite dans laquelle je travaille m’a chargé du marché marocain».
Et pourtant vous vous trouvez en Espagne en résident permanent. «Pour des raisons économiques ! L’Espagne se trouve en effet à une sorte de carrefour entre la France, le Portugal et le Maroc. Les vols vers le royaume Chérifien sont d’ailleurs peu chers : une soixantaine d’euros aller-retour»
M. Garci ne cesse de grimper les échelons. Sa société vient en effet de le charger de tout le marché africain, et non seulement du marocain. Mais quid de la Tunisie ? «Malheureusement, le marché de l’immobilier en Tunisie n’est pas assez développé pour qu’on puisse s’y intéresser», répond-il.
Il reste toutefois confiant sur l’avenir économique de son pays d’origine qui pourrait être le nouvel «eldorado de l’Afrique».
Et la révolution vue de l’Espagne ? «Vous ne pouvez pas imaginer combien elle nous a fait gagner d’estime aux yeux des Espagnols. Je me rappelle que le 13 janvier, à la veille de la chute de la dictature, on a essayé, nous Tunisiens, de se rassembler ici à Barcelone. A peine une trentaine à être au rendez-vous, (vu qu’on est peu nombreux) nous étions dans une place de la ville, pour manifester pour la liberté de notre patrie. A notre plus grande surprise, les habitants de Barcelone, surtout les Catalans, étaient présents en nombre. Ils étaient là pour nous soutenir.
Aujourd’hui, à chaque fois qu’on me demande ma nationalité et que je réponds ‘’Je suis tunisien’’, mes interlocuteurs m’expriment systématiquement leur plus grand respect à la Tunisie et aux Tunisiens. Jamais je n’ai été aussi fier d’être tunisien… C’est magique !».
Morad Garci a par la suite tenu à nous emmener à la place Catalunya, en plein centre de Barcelone. «Comme à la Puerta Del Sol à Madrid, les ‘indignés’ se sont aussi installés ici pour exprimer leur contestation. Au début du mouvement, il y avait un seul drapeau qui flottait sur cette place. Devinez lequel ?». Et il nous montra du doigt une statue portant le drapeau tunisien avec un masque Anonymous. «Il a été mis ici depuis le début du mouvement. D’autres drapeaux ont suivi. Tous ont été enlevés, sauf celui-là. Dieu que j’en suis fier».
Welid Naffati
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