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Un an après, Tunisie Telecom commence à payer très cher ses mois de grèves

Les parts de marché de l’opérateur historique ont baissé de 10% en une année, pendant que Orange vient de dépasser la barre de 1 million de clients GSM. Peut-on alors annoncer dès maintenant le début du déclin de la branche mobile de Tunisie Telecom ? Pas si sûr.

Presque une année s’est écoulée depuis le mouvement syndical qui a secoué Tunisie Telecom durant plus de 3 mois. Mais c’est seulement maintenant que l’opérateur historique commence à payer très cher les mois de grèves générales qui ont paralysé l’activité de l’entreprise juste après la chute du régime de Ben Ali. Sans parler des actes de vandalisme qu’ont subi les Actels et les équipements de l’opérateur dans les régions durant la période d’insécurité. D’après les dernières statistiques de l’Instance nationale des télécommunications (Int), ses parts dans le marché mobile ont en effet régressé en une année, passant de 40,8% en décembre 2010 à 30,7% en décembre 2011 et ce, en dépit d’une légère hausse dans le nombre de ses abonnés GSM (4,5 millions en 2010 contre 4,6 millions en 2011).

Tunisiana a observé, par contre, un bon considérable dans le nombre de ses clients. Il est ainsi passé, et pour la même période, de 5,9 millions à 6,6 millions. Même chose pour Orange dont le parc global de lignes mobiles a évolué de 649 milles en 2010 à 1,13 million en 2011.

La fin de TT mobile ?

Faut-il alors annoncer dès maintenant la mort de la branche mobile de Tunisie Telecom ? Pour les détracteurs de l’opérateur historique, c’est une évidence. Mais affirmer ceci relèverait d’une méconnaissance profonde du secteur des télécoms en Tunisie.

En effet, et malgré son image «vieillotte», Tunisie Telecom a su tout de même garder un certain poids sur le marché professionnel… justement grâce à Tunisiana et Orange. Et pour cause, ces deux derniers ont tellement joué sur l’aspect ‘jeune et branché’ de leur marque pour conquérir le grand public, que cela a fini par leur coller l’étiquette de «farfelus» dans les milieux Business.

En clair : si on est du grand public, avoir une ligne Tunisiana ou Orange ça fait «In». Chez les professionnels, par contre, ceci donnerait plutôt une image de «Pas sérieux». C’est ce qui explique par ailleurs la prédominance de Tunisie Telecom mobile sur la branche Business.

Mais même sur ce secteur, Tunisie Telecom risque bien de perdre son leadership si elle ne change pas sa stratégie. Avec l’ouverture de la boucle locale pour Orange (lire à propos du dégroupage de la première ligne fixe) et l’appel d’offres international pour l’octroi d’une nouvelle licence fixe/3G (que Tunisiana est pressenti de remporter), les deux concurrents de TT pourront alors travailler sur des solutions convergentes fixe/mobile/Internet qui ne tarderont pas à séduire les professionnels tant que cela les rendra plus efficients.

Mais faut-il pour autant laisser le champ libre à ses concurrents et délaisser le parc résidentiel ? Non plus. Il est clair qu’une opération de rajeunissement de la marque de Tunisie Telecom est absolument nécessaire pour lui donner une image plus fraiche, plus hi-tech, plus branchée, plus réactive et moins administrative. Mais chercher par tous les moyens à séduire les jeunes en parlant leur langage, serait une perte de temps avec un résultat qui risque d’être désastreux.

La solution ? Les MVNO

Le Maroc va bientôt avoir un nouvel opérateur, mais qui sera virtuel. C’est à dire qu’il sera basé sur le réseau des trois opérateurs mobiles déjà en activité au Maroc. Ce MVNO (pour Mobile Virtual Operator) sera celui de la Poste marocaine. Sur la base d’accords avec les opérateurs de télécommunications déjà en place, Poste Maroc exploitera leurs réseaux en achetant en gros du crédit (minutes de conversation) qu’elle revendra au détail, sous sa propre marque.

Poste Maroc serait actuellement en train d’étudier le prix de la minute qu’elle va commercialiser et des contacts seraient en cours avec l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT), l’instance de régulation des télécoms du Royaume chérifien.

En Tunisie et depuis 2009, Tunisie Telecom a lancé un MVNO qui s’appelle Elissa. Grâce à lui, l’opérateur historique a voulu conquérir les jeunes de moins de 25 ans sous une autre dénomination commerciale. Mais suite aux mouvements de protestation syndicale qui ont bloqué l’opérateur historique, Tunisie Telecom a fini par mettre en ‘stand by’ Elissa. Le temps de restructurer l’entreprise et de la rendre plus compétitive.

Et si la Poste tunisienne devenait un opérateur mobile ?

Si Tunisie Telecom veut reconquérir le marché du grand public, l’entreprise doit absolument ouvrir son réseau mobile à plusieurs MVNO. La Poste tunisienne, par exemple, pourrait jouer ce rôle là avec une partie de la population. Grâce notamment à son réseau de distribution très ramifié dans toute la Tunisie, ainsi que sa logistique (e-dinar, les mandats, etc.). Elle pourrait séduire une bonne partie de la population, notamment hors agglomération, ainsi que les chefs de famille (qui ont généralement plus de 35 ans). Pour les plus jeunes, d’autres entreprises privées pourraient lancer des MVNO qui leur seront spécialement dédiés.

Après tout, on a bien noté que les opérateurs Tunisiana et Orange semblent avoir délaissé ces niches après la ‘chute’ de Elissa. Ils ne communiquent quasiment plus sur leurs offres «Jeunes» (‘Amigos’ pour le premier, ‘Play’ pour le deuxième). Ces derniers affichent même une certaine stagnation.

Et puis, qui mieux que Tunisie Telecom peut lancer des MVNO ? Le réseau mobile de l’opérateur historique est plus solide que ses concurrents. Il peut supporter la charge de trafic supplémentaire que généreront ces MVNO. En effet, le réseau de collecte de TT (entre les antennes relais et le cœur du réseau) est majoritairement basé sur la transmission filaire. Celui de Tunisiana et Orange est par contre basé sur le faisceau hertzien, dont les capacités de transmission sont plus limitées que celles du filaire.

Grâce aux MVNO, Tunisie Telecom pourrait donc concentrer ses efforts sur le marché Pro. Grâce à ses partenaires qui exploitent son réseau, TT pourrait reconquérir facilement le segment grand public, du moins le temps que cette entreprise publique se restructure, notamment au niveau de ses ressources humaines.

W.N

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