Un haut cadre chez Tunisie Telecom a adressé à la rédaction de THD cette lettre pour exposer son point de vue sur les grèves et les sit-in qui secouent l’opérateur historique depuis plusieurs semaines. Ayant quitté ses fonctions depuis quelques années, elle y apporte des éclaircissements sur la politique RH de Tunisie Telecom. Une politique plutôt “dictée” par le partenaire émirati EIT.
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La poule aux œufs d’or de l’Etat tunisien risque encore de voir des jours de grève dans la semaine. Le syndicat de Tunisie Telecom semble déterminé à poursuivre son mouvement jusqu’à la réalisation de ses revendications.
Dans leur lettre adressée le 12/2/211, Le Syndicat positionne son action dans l’axe de la révolution tunisienne, oui mais si nous allons dans le détail des coulisses, certains éclaircissements doivent être apportés :
Les agents et les cadres surpayés de Tunisie Telecom
Vers fin 2006 et début 2007, ce même syndicat avait fait plusieurs appels à la grève et ce contre la privatisation majoritaire de la Société nationale des télécommunications. La vente de 16% supplémentaires donnait en effet droit au partenaire émirati de gérer les ressources humaines. Sur ce point, le partenaire avait prévu un plan de licenciement/départ «volontaire» de près de 40% des salariés (TT compte plus de 8 000 employés). Notons que la masse salariale de Tunisie Telecom est la plus importante charge de l’entreprise. En réponse à cette action, la vente de 16% supplémentaires avait été repoussée. L’Etat tunisien, principal actionnaire, a répondu aux attentes de ses salariés par la meilleure garantie qui soit. Celle de garder le statut des travailleurs comme étatique, et donc impossible à licencier par le partenaire. Une manœuvre qui a fait grincer les dents de Dubaï.
Le partenaire émiratis a alors rétorqué par une autre combine. Comme toute pratique managériale internationale, les émiratis ont ramené leurs propres compétences. Ils leur ont donné les mêmes tâches (“jobs descriptions”) que celles de certains de leurs homologues tunisiens. Avec une grille salariale internationale, cependant. Plus élevée que la grille pratiquée par la société. La guerre des nerfs a alors été déclarée au sein de Tunisie Telecom. Son but : pousser indirectement les gens à partir.
Un bel épineux problème s’est présenté à l’Etat tunisien, actionnaire majoritaire dans Tunisie Telecom. Ayant déjà apporté une garantie il y a quelques années, que peut-il faire de plus aujourd’hui ? Les émiratis ont déjà surpayé l’achat des 35% et attendent depuis 2008 de devenir majoritaires. Pensent-ils déjà que cela n’est qu’illusion ?
Utopiquement, tout le monde devait s’aligner à la grille salariale de Tunisie Telecom et des concours internes devaient avoir lieu fréquemment pour garantir un plan de carrière au sein de TT. Cette guerre froide ne pouvait donc cesser qu’en appliquant cette méthode.
Tunisie Telecom dépouillée par les “Trabelsi”
Le syndicat crie à la corruption financière pratiquée chez Tunisie Telecom au grand bénéfice des Trabelsi. Ceci est un fait !
L’état et ses représentants au sein de la société ont longtemps été poussés à diriger des appels d’offres, biens immobiliers, matériels (etc.) destinés et taillés sur mesure pour ces mafieux. Et pour cause : Tunisie Telecom est l’une des plus grandes sources de revenus. Les mafieux l’avaient bien compris.
Reste que le syndicat devrait protéger les preuves après la chute de Ben Ali et les transmettre par la suite à la commission fraichement établie pour enquêter sur les fraudes. Encore faut-il que ces preuves soient encore présentes, ou qu’elles ne portent pas des noms fictifs. La partie tunisienne de Tunisie Telecom devra, quant à elle, promettre toute la transparence sur ce point ainsi qu’apporter toute l’aide demandée par la commission.
Il ne faut surtout pas oublier que le syndicat de Tunisie Telecom est issu du grand syndicat de la Poste tunisienne. En espérant qu’ils seront prêts à s’assoir à la table des négociations avec les différents actionnaires de la société nationale des télécommunications.
Au final, et après toutes ces revendications… Et si l’état décidait de vendre les 16% qui restent aux émiratis pour que l’EIT devienne majoritaire ?
Signé : une ex haut cadre de Tunisie Telecom
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