Khadija Hammouda Gheriani est un nom qui a brillé dans le secteur des TICs en Tunisie. Actuellement présidente de l’association des Sup’Com tunisiens, elle fait partie des rares femmes tunisiennes ayant joué un rôle clé dans le développement du secteur en Tunisie. Invitée du 199e épisode de DigiClub powered by Topnet, elle nous raconte son parcours exceptionnel.
Après une scolarité publique à l’école primaire et au lycée secondaire Rue de Russie dans le centre ville de la capitale Tunis, elle rejoint les bancs la faculté des Sciences de Tunis pour un cursus universitaire de mathématiques. Sa maîtrise obtenue, elle s’envole en France pour un troisième cycle de formation à Paris-VI (Université Pierre et Marie Curie), puis à Télécom Paris.
” Quand j’étais jeune, je passais beaucoup de temps au téléphone (le fixe classique) et mon père me lançait à chaque fois des reproches disant ‘Khadija, parler c’est pas gratuit ! Tu vas finir postier si tu continues comme ça’ “, s’est-elle remémoré non sans émotion ces paroles prophétiques.
Sa fascination pour les télécommunications a encouragé Mme Hammouda Gheriani à se spécialiser dans les télécoms. En 1984, pour son projet de fin d’études en mathématiques appliquées, elle a, d’ailleurs, eu le privilège de travailler étroitement avec les équipes ayant conçu la norme GSM, alors appelée «téléphonie cellulaire numérique à 900 MHz».
“Quand on m’a dit qu’on comptait vendre ce service à 400 000 abonnés, je n’y ai pas cru. Je me rappelle que je faisais des tests du réseau dans la rue pour le hand-over (le passage de la communication d’une antenne à une autre sans interruption ou dégradation du service, ndlr). Et finalement les ventes ont dépassé, et de loin, les estimations”.
Cinq ans plus tard, à son retour en Tunisie, elle intègre, en tant qu’ingénieur, l’équipe de Transmission relevant de la Direction générale des Télécommunications au sein du ministère des Télécommunications dirigé alors par Brahim Khouaja.
“A l’époque, les décisions étaient prises sur la base de l’innovation technologique. On était parmi les premiers pays à opter pour les commutateurs numériques”, a-t-elle indiqué faisant ainsi référence, indirectement, aux choix stratégiques des dernières années, pour la plupart populistes, et dont l’objectif était de produire des effets immédiats sans prendre en considération les investissements qui, sur le long terme, risquent de coûter cher au contribuable.
En 1991, Khadija Hammouda Gheriani rejoint une nouvelle aventure. A la demande de Taher Lakhder, alors directeur de l’Ecole des PTT, elle participe à la restructuration de ce qui deviendra plus tard un des plus prestigieux établissements universitaires tunisiens : l’École supérieure des communications de Tunis (Sup’Com).
” L’Ecole des PTT était un peu le dernier recours de ceux qui n’arrivaient pas à décrocher une bonne filière. Nous avons travaillé dur pour ramener des élèves élites, en octroyant des bourses et en sollicitant des professeurs de Telecom Paris”, a-t-elle expliqué.
Trois ans plus tard alors que le Centre d’Etudes et de Recherche des Télécommunications (CERT) démarraient ses activités (1991) pour soutenir le développement du secteur des télécommunications, elle intègre le centre en tant que directrice des études puis directrice générale marquant ainsi un tournant majeur dans sa carrière professionnelle.
En 1998, année témoin de la mise en place du Xe plan de développement économique incluant la modernisation de l’infrastructure telco, Khadija Hammouda Gheriani est nommée PDG de l’Agence tunisienne d’Internet (ATI) dont l’objectif numéro un était de développer internet dans le pays.
Moins de deux ans plus tard, elle prend les rênes de l’opérateur historique, Tunisie Telecom, pour ainsi devenir la seule et unique femme tunisienne à avoir occupé ce poste jusqu’à ce jour. Une expérience brève qui s’est clôturée avec succès le jour où Khadija Hammouda Gheriani a été appelée pour fonder l’Agence nationale des Fréquences (ANF).
En 2004, elle est nommée secrétaire d’Etat en charge des nouvelles technologies, Internet, et logiciels libres. Puis en 2005, secrétaire générale de l’AICTO (Arab Information and Communication Technologies Organization).
Depuis 2016, elle préside l’association des Sup’Com tunisiens. Créée en 1983, l’association regroupe tous les anciens élèves sortants des écoles supérieures des télécommunications de Paris et de Brest.
L’interview au complet est disponible sur SoundCloud.
Nadya Jennene