«Aujourd’hui, le gouvernement de Jbali vient de mettre en service un centre avec un système pour analyser l’Internet (DPI, pour Deep Packet Inspection) qui permettra de contrôler les messages échangés, de les filtrer et de les censurer». C’est le message que les facebookeurs tunisiens sont en train de partager en masse depuis dimanche dernier.
Un certain Fawzi Ayadi écrira même que ce centre utilise «une technologie plus poussée que celle utilisée avant par les services de l’Agence Tunisienne d’Internet (ATI) sous Zaba afin d’intercepter les communications et analyser les données».
Selon ce «spécialiste», le gouvernement aurait «profité du repos dominical» pour mettre en place ce système grâce aux efforts des «techniciens américains et de ceux de l’ATI». Cette opération rentre dans le programme du gouvernement dans «la lutte contre le terrorisme d’El Qaida, et celle de l’AQMI (Al-Qaida au Maghreb Islamique) en particulier. Si votre connexion s’est interrompue ce matin (le dimanche 23 septembre, ndlr) pour plus d’une heure et/ou a subi beaucoup de ralentissement toute la matinée, c’est que le réseau d’où vous dépendez vient d’être raccordé au “CSDPI”», affirme-t-il avant de conclure que «le gouvernement vient, ainsi, de placer ses internautes, et notamment les opposants à sa politique, sous surveillance grâce à ces équipements».
Le matin du dimanche 23 septembre dernier, un incident s’est déclaré sur la dorsale Internet nationale de Tunisie Telecom causant de graves problèmes de connexion à plusieurs abonnés ADSL. Chez d’autres, d’énormes ralentissements dans la navigation ont été ressentis.
«C’est vers le coup de midi que la majorité des clients ADSL ont pu reprendre une connexion normale. D’après l’Agence Tunisienne d’Internet (ATI), cette perturbation est due à un incident déclaré sur le Backbone national de Tunisie Telecom. D’après l’ATI, ce problème n’était pas général et a été définitivement résolu vers 12h30», avons-nous écrit hier à propos de cette panne.
Le gouvernement, dominé par le mouvement islamiste Ennahdha, a-t-il vraiment installé un centre d’espionnage du Net à l’insu des Internautes et de l’Assemblée Nationale Constituante (ANC) au point de causer un dysfonctionnement du trafic Internet national au moment du «raccordement» ? THD a contacté le ministre des Technologies de l’information et de la communication, Mongi Marzoug, pour en avoir le cœur net. Alors ? Info ou Intox ?
«C’est de la pure Intox», nous répond le ministre des TIC. «En tout cas, je ne suis pas au courant et je ne pense pas que les USA ont besoin de nous (pour espionner les paquets, ndlr). Le DPI est une technologie très répandue. Elle est utilisée en particulier par les opérateurs mobiles pour gérer le trafic au niveau des services autorisés ou encore le ‘fair use’ (mieux contrôler les plus gros consommateurs de débit pour éviter la saturation du réseau), etc.».
En clair : le DPI n’est pas une technique propre aux gouvernements pour espionner leur cybercitoyens, mais elle est plutôt utile pour les opérateurs pour mieux dimensionner leur réseau. Une sorte de contrôle du flux dans un but purement technique. Encore faut-il avoir la garantie que ces opérateurs respectent la vie privée de leurs clients et que ce contrôle ne se limite qu’à la technique et n’est pas guidé par des fins commerciales.
«Notre position pour la liberté d’accès sur Internet est une question de principe», martèle M. Marzoug. «Le réaliser nécessite un travail d’organisation, un cadre juridique et une réglementation de l’espace cybernétique (traitement, stockage, et transmission/diffusion de l’information) qui soit adéquat pour contribuer à l’édification d’une Tunisie numérique et démocratique».
Rappelons que la Tunisie a annoncé le 6 septembre dernier son adhésion à la coalition Freedom Online, un groupement de pays qui militent pour les libertés et la neutralité sur le Net.
W.N
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