Le forum international “ICT4ALL” 2013 se tient du 11 au 14 novembre à Hammamet, à l’initiative du ministère des Technologie de l’information et de la communication, en partenariat avec l’UIT, l’UNESCO, CNUCED, GAID (ONU), la BM, la BAD, l’Union africaine, la Ligue des Etats arabes et l’ONU. Lors de la première journée, il y a été beaucoup question de TIC mais encore plus de tourisme. Quel est donc le rôle des TIC dans le changement du tourisme tunisien ? Peuvent-ils soutenir un tourisme plus durable ? En comblant la fracture numérique du tourisme, serions-nous sur un changement de paradigme ?
Le forum international “ICT4ALL” 2013 se tient du 11 au 14 novembre à Hammamet, à l’initiative du ministère des Technologie de l’information et de la communication, en partenariat avec l’UIT, l’UNESCO, CNUCED, GAID (ONU), la BM, la BAD, l’Union africaine, la Ligue des Etats arabes et l’ONU. Lors de la première journée, il y a été beaucoup question de TIC mais encore plus de tourisme. Quel est donc le rôle des TIC dans le changement du tourisme tunisien ? Peuvent-ils soutenir un tourisme plus durable ? En comblant la fracture numérique du tourisme, serions-nous sur un changement de paradigme ?
Pour atteindre cet objectif, encore faut-il commencer à réussir à mobiliser les intervenants du tourisme autour de ceux des TIC. Or, l’absence de ces derniers à cette journée de travail est édifiante sur les rapports froids -pour ne pas dire inexistants- entre les deux secteurs. «Un appel d’offres pour la création d’une plateforme dédiée au tourisme alternatif est en voie d’être validée sans même que les opérateurs ni le ministère de tutelle ne soient au courant», déplore Afif Kchouk, au nom de la profession du tourisme.
Loin s’en faut s’en défend Fethi Choubani, Conseiller auprès du ministre des TIC : «Nous avons sorti ce dossier du placard. Nous sommes prêts à soutenir, financer, apporter du savoir-faire et sommes loin de nous immiscer dans des métiers que nous ne connaissons pas. Or, il est impératif d’acquérir les compétences essentielles et d’instaurer les mécanismes nécessaires pour dompter ce monde en pleine mutation et en perpétuelle évolution et le mettre au service et au profit de tous les domaines y compris le tourisme».
Malaise et ratage
Le malaise est perceptible et pas que durant cette réunion. Il est édifiant sur le manque de «savoir travailler» ensemble dont la première à payer la facture est la destination Tunisie. Nous sommes face à une administration du tourisme vieillissante et des opérateurs immatures qui n’ont pas su profiter des technologies pour s’affranchir, entre autres, de la mainmise des Tour Opérateurs.
A quelques exceptions, ils sont restés insensibles aux principaux tournants des technologies comme le minitel ou le web et cela semble se confirmer encore plus à l’ère du Tourisme mobile. Le Net ne pardonne pas. Il reflète l’état des lieux. En l’occurrence, il confirme l’état de défaillance du tourisme. Aujourd’hui, la destination paye tout bonnement la facture de ce retard accumulé.
C’est précisément en direction de cette fracture que tout le monde louche. Le secteur privé national et international, la société civile et l’université redoublent d’efforts afin de tenter de combler les brèches d’un «touristoNet» ou un «mobitouriste» qui sont une réalité à portée de clavier ou de téléphone.
Or, jamais le tourisme tunisien ne s’est aussi mal porté et si l’on dit que les crises sont les plus grandes créatrices d’innovations, il va falloir le prouver et vite. Car à ce jeu de l’immobilisme, la destination risque d’hypothéquer les prochaines décennies de son «or vert».
Les investisseurs sont prêts, mais le gouvernement… pas
Il est vital de révéler les projets porteurs de transition touristique. Un tourisme qui sera forcément plus orienté «Culture, Nature et Patrimoine». Un tourisme capable d’amorcer un nouveau cycle plus vertueux, respectueux de l’environnement, plus équitable pour les populations locales et qui briserait le cachet mono produit de masse et de saisonnalité des produits touristiques tunisiens.
Ce nouveau modèle est-il en gestation ? Rien ne le prouve, mis à part quelques projets sporadiques de la société civile qui tentent une approche d’intelligence territoriale et de sensibiliser le monde des affaires au potentiel économique du patrimoine. Comme l’Association «Tourath» qui investit dans un partenariat tuniso-italien afin de créer des applications dédiées aux sites archéologiques tunisiens comme «Bulla Regia», «Dougga» et «Carthage» puis de mettre en place des circuits transfrontaliers.
D’un autre côté, de trop nombreux intervenants internationaux (fondations, banques de développement, associations) se bousculent au portillon pour soutenir des efforts quasi inexistants et solliciter le secteur privé et public tunisien dans des démarches collaboratives de conception et de promotion.
Si certains y voient une opportunité pour déconstruire un tourisme obsolète, d’autres sont plus craintifs et voient en cet attrait une volonté de reprise en main d’un secteur sur lequel la Tunisie n’a jamais porté une vraie réflexion. Un secteur dont la crise traduit l’échec.
Un cadre de plus en plus noir
«Jusqu’à quand allons-nous payer pour maintenir un secteur de revenus négatifs dont les emplois sont la consommation de nos ressources ? Un modèle qui n’a qu’une valeur d’usage et pas de retombées réelles sur les populations ?». Les propos de l’économiste algérien Dr Khelifa Messameh sont acerbes. Il estime que la Tunisie n’a pas eu le temps de vraiment construire ni réfléchir son tourisme. Pas plus que ne l’a fait le Maroc ou ne s’apprête à le faire l’Algérie sans trop savoir comment.
Pourtant, aujourd’hui il faut rester attentif pour ne pas reproduire les mêmes schémas de dépendance vis-à-vis des marchés. Nous ne pouvons continuer à produire pour plaire aux autres et leur permettre de faire ce qu’ils ne peuvent faire chez eux à moindre coût. Nous devons aborder la question du tourisme avec les ‘4E’ qui s’imposent à la phase de restructuration après l’accumulation. A savoir l’Environnement, l’Encadrement, l’Equipement et l’Evénementiel.
Cela passe fatalement par un compromis, voire des compromis. On ne passe pas du jour au lendemain d’un tourisme de masse avec ses écueils à un autre plus vertueux. En cela, les TIC peuvent révéler les initiatives innovantes et délimiter les espaces dédiés aux différentes formes de produits spécifiques comme le tourisme rural ou actif.
Ce n’est qu’à partir des réponses de fond que la paire TIC et tourisme fonctionnera et réussira à se mettre en place. Nous devons seulement commencer par le commencement : Quel tourisme voulons-nous ? A qui profite le tourisme ? Quel est le prix que nous voulons mettre pour développer ? Qui doit en avoir les clefs ?
Amel Djaiet