«Nos ingénieurs peuvent faire gagner des millions de dinars à la Tunisie rien qu’avec leur savoir faire», a déclaré M. Amine Manai, fondateur du parti pour la justice social-démocrate (PJSD) lors de son premier meeting populaire tenu le lundi 11 juillet à la maison des jeunes d’El Menzah 6 à Tunis.
«Avec leurs diplômes, nos ingénieurs de développement, comme les programmateurs, pourront aller arracher des marchés sur le continent africain. Je ne comprends pas pourquoi on cherche par tous les moyens à exporter notre savoir faire au vieux continent sans qu’il y ait, en retour, une vraie valeur ajoutée pour la Tunisie. Notre pays a fini par devenir un grand garage de sous-traitance pour l’Europe», rajoute-t-il sur un ton ironique devant une audience peu nombreuse dans la salle, composée essentiellement de jeunes.
M. Manai s’est également indigné du peu d’intérêt qu’accordent les hautes sphères de l’Etat aux chômeurs : «Comment se fait-il qu’il y ait si peu d’intérêt pour nos diplômés à la recherche d’emploi ? Au PJSD, nous croyons dans le potentiel de ces personnes à résorber, par eux-même, le taux de chômage en Tunisie. Comment ? Grâce à l’entreprenariat».
La solution ? Une Star Academy des entrepreneurs
Oubliez les présentations des programmes politiques longs et ennuyeux. La solution du PJSD pour combattre le chômage se tient en une seule phrase : «Il faut faire une Star Academy des entrepreneurs», déclare le fondateur du parti.
M. Manai appelle donc à la création de caravanes ambulantes où les chefs d’entreprises pourront aller chercher leur futurs investissements, directement auprès des jeunes et dans les régions, s’il vous plait !
«Parfois un jeune n’a même pas 1 dinar pour se déplacer à un rendez-vous d’embauche, alors que dire pour aller présenter son projet devant un entrepreneur, surtout si on habite loin de la ville ?». M. Manai estime ainsi que de telles caravanes vont permettre d’optimiser les ressources : moins de dépenses de la part des jeunes, plus de proximité avec les régions, plus d’opportunités d’investissement pour les chefs d’entreprises et donc plus de bénéfices dont découle, in fine, la création de nouveaux postes de travail.
Une vision simpliste des problèmes
M. Amine Manai a par la suite expliqué que son parti politique était le premier dans son genre à ne pas avoir de bureau politique. «Notre bureau politique ? Ce sont les tables rondes. Chacun a le droit de venir à ces tables rondes et proposer ses idées dans son domaine de spécialité», explique-t-il à son audience. Mais ces tables rondes n’ont vraisemblablement pas réussi à établir un programme politique clair, loin du discours populiste à la façon “des pages facebook (pseudo)révolutionnaires”.
Par exemple. Si on se focalise sur le volet “high-tech” du parti, et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous nous sommes déplacés à ce meeting, on verra que la solution prônée par M. Manai pour nos développeurs verse plutôt dans l’utopie.
Si nos ingénieurs et informaticiens se réfugient en Europe et en Amérique du Nord pour développer leurs outils, c’est pour une raison bien simple : ils courent moins de risque à se faire voler leur idée là-bas que dans leur pays natal.
Encore faut-il rappeler que les lois de protection de la propriété intellectuelle en Afrique, et en Tunisie en particulier, sont loin d’être efficaces (pour ne pas dire quasi-inexistantes) ?
Pire encore : Quelles sont les garanties de ces jeunes chômeurs pour que leurs idées ne soient pas tout bonnement volées par ces entrepreneurs, lors de cette “Star Academy” d’un nouveau genre ?
Et même si toutes ces garanties étaient satisfaites, avec la formation inhérente de plusieurs start-up, comment ces entreprises pourront-elles s’installer dans les régions intérieures du pays quand la Tunisie dispose d’une infrastructure (routière et de télécommunication) brinquebalante en dehors des villes côtières ? La top priorité dans ce cas-là ne doit-elle pas passer par une réforme du secteur des télécoms, et notamment celui de l’accès haut débit ?
Le parti pour la justice social-démocrate est un parti jeune, qui cherche à se démarquer du discours politique vieillot, sans rompre, pour autant, avec les bonnes vielles recettes de la communication politique. C’est à dire un mélange entre le jargon jeune “facebookien” et les vannes tunisiennes à la Mourou, ornementé de quelques citations coraniques et/ou littéraires à la Beji Caid Essebsi. Mais côté sérieux du programme politique, et surtout côté TIC, la sauce n’a visiblement pas (encore) pris.
Welid Naffati
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