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Officiel – Les conditions générales d’exercice de la télémédecine

L’exercice de la télémédecine est enfin officiel. Un décret présidentiel fixant les dispositions générales et conditions d’exercice de la télémédecine a été publié dans le Journal officiel de la République tunisienne (Jort), mardi.

Article premier – Les dispositions du présent décret Présidentiel fixent les conditions générales d’exercice de la télémédecine et les domaines de son application.

Chapitre premier

Dispositions générales

Art. 2 – Outre les dispositions de la loi n° 91-21 du 13 mars 1991, susvisée et celles du présent décret Présidentiel, l’exercice de la télémédecine est soumis aux dispositions des codes respectifs de déontologie médicale, du médecin dentiste et du pharmacien.

Art. 3 – Au sens du présent décret Présidentiel, on entend par :

– La téléconsultation : l’acte qui consiste, pour un médecin ou un médecin dentiste, à donner une consultation médicale à distance à un patient, éventuellement assisté d’un professionnel de santé qualifié.

– La télé-expertise : l’acte ayant pour objet de permettre à un médecin ou un médecin dentiste de solliciter à distance l’avis d’un ou plusieurs confrères, en raison de leurs formations ou de leurs compétences particulières, et ce sur la base d’informations médicales liées à la prise en charge d’un patient.

– La télésurveillance médicale : l’acte ayant pour objet de permettre à un médecin ou un médecin dentiste de surveiller et d’interpréter à distance les données nécessaires au suivi médical d’un patient et, le cas échéant, de prendre des décisions relatives à sa prise en charge. L’enregistrement et la transmission des données peuvent être automatisés ou réalisés par le patient lui-même ou par un professionnel de santé.

– La téléassistance médicale : l’acte ayant pour objectif de permettre à un médecin ou un médecin dentiste d’assister à distance un autre professionnel de santé lors de la réalisation d’un acte médical.

– La régulation médicale : la réponse médicale à distance apportée à un patient dans le cadre d’un tri médical pratiqué au niveau des services d’assistance médicale urgente afin de déterminer et d’enclencher la réponse la mieux adaptée à la nature de l’appel.

– La prescription médicale électronique : un document dématérialisé rédigé par un médecin ou un médecin dentiste dans le cadre de l’exercice de la télémédecine, déposé sur une plateforme sécurisée exprimant une décision médicale suite à l’examen du malade et qui comporte une prescription de médicaments, d’examens ou de soins. Elle doit comporter notamment l’identité du médecin ou du médecin dentiste, sa signature électronique, la date de l’examen et l’identité du patient.

– La plateforme de télémédecine : un bouquet de services numériques regroupés dans un espace commun dans le respect des règles d’urbanisation, d’interopérabilité, de sécurité et d’éthique permettant l’usage de services à valeur ajoutée dans le domaine de la télémédecine.

Art. 4 – La télémédecine est exercée par les médecins et médecins dentistes autorisés à exercer leur profession en Tunisie conformément à la législation et la règlementation en vigueur.

Chapitre II

Les domaines d’application de la télémédecine

Art. 5 – Constituent des actes de télémédecine, les actes de téléconsultation, de télé-expertise, de télésurveillance médicale, de téléassistance médicale et de régulation médicale.

Art. 6 – Sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé les conditions spécifiques de la réalisation des actes de télémédecine pour chaque spécialité médicale ou chirurgicale.

Les conditions spécifiques de la réalisation des actes de télémédecine pour les spécialités techniques médicales militaires sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé, après avis du ministre chargé de la défense nationale.

Art. 7 – La réalisation des actes de télémédecine dans les deux secteurs public et privé s’effectue dans le cadre d’une plateforme ou d’un projet de coopération médicale entre les structures sanitaires publiques, entre une structure sanitaire publique et une autre structure publique ou entre une structure sanitaire publique et un établissement sanitaire privé.

Les modalités de coopération médicale entre les structures et établissements visés à l’alinéa premier du présent article pour la réalisation des actes de télémédecine sont fixées dans le cadre d’une convention conclue à cet effet entre les structures concernées.

Chapitre III

Les conditions générales d’exercice de la télémédecine

Section I – L’autorisation

Art. 8 – La réalisation des actes de télémédecine est soumise, outre l’autorisation de l’Instance nationale de protection des données à caractère personnel, à une autorisation préalable du ministère de la santé octroyée conformément aux procédures définies par le présent décret Présidentiel, après avis d’un comité d’évaluation dont les attributions, la composition et les modalités de fonctionnement sont fixées par arrêté du ministre de la santé.

Sous réserve des dispositions de l’alinéa premier du présent article, la réalisation des actes de télémédecine dans le milieu militaire peut être soumise à des procédures spécifiques fixées par arrêté du ministre de la défense nationale.

Art. 9 – Toute personne désirant mettre en place une plateforme de télémédecine ou réaliser des actes de télémédecine dans le cadre d’un projet de coopération médicale, doit déposer, auprès du ministère de la santé, une demande contre décharge indiquant la date de dépôt de la demande ainsi que la liste des documents déposés.

Le comité visé à l’article 8 du présent décret Présidentiel, doit, dés la réception de la demande d’autorisation, vérifier qu’il contient tous les documents définis par arrêté du ministre de la santé. Si la demande est incomplète, le comité doit, dans un délai maximal de vingt (20) jours ouvrables, à compter de la date du dépôt de la demande, convoquer le demandeur de l’autorisation, par tout moyen laissant une trace écrite, pour compléter son dossier.

Art. 10 – Le ministère chargé de la santé doit répondre aux demandes d’autorisation de la mise en place de la plateforme de télémédecine ou de l’exercice des actes de télémédecine dans le cadre d’un projet de coopération médicale dans un délai maximum de quatre vingt dix (90) jours à compter de la date de dépôt d’un dossier complet.

En cas de refus, la décision de refus doit être écrite et motivée.

Art. 11 – L’utilisation de la plateforme de télémédecine se fait par une convention conclue à cet effet entre le propriétaire de la plateforme et le médecin ou le médecin dentiste concerné.

Pour les médecins et les médecins dentistes de libre pratique, la convention doit être visée par l’ordre professionnel concerné qui se charge d’en informer le ministère de la santé dans un délai ne dépassant pas trente (30) jours de la date de conclusion de ladite convention.

Pour les médecins et les médecins dentistes exerçant dans le secteur public, la convention doit être visée par le ministère de tutelle sectorielle concerné.

L’exercice de télémédecine dans le cadre d’un projet de coopération médicale se fait soit par l’utilisation des moyens propres de l’établissement ou par un contrat conclu, à cet effet, entre le représentant légal de l’établissement et le propriétaire de la plateforme.

Le modèle de la convention et du contrat visés aux alinéas 1 et 2 du présent article est fixé par arrêté du ministre de la santé.

Art. 12 – La demande d’autorisation de la mise en place de la plateforme de télémédecine doit contenir une présentation détaillée des frais d’utilisation envisagés pour les différentes catégories d’utilisateurs.

Les frais résultant de l’utilisation de la plateforme de télémédecine sont fixés de manière à garantir un accès équitable aux services de télémédecine par les professionnels de santé et ce indépendamment du nombre d’actes réalisés.

Aucun frais n’est exigé lors de l’utilisation des pharmaciens de la plateforme de télémédecine pour assurer la dispensation des médicaments sur prescription médicale électronique.

Art. 13 – L’exercice de la télémédecine, destiné aux patients résidents à l’étranger, par les médecins et les médecins dentistes relevant du secteur public ou du secteur privé, doit être déclaré préalablement aux services compétents du ministère de la santé et aux ordres professionnels concernés.

Section II – Les conditions techniques

Art. 14 – La plateforme de télémédecine et le projet de coopération médicale, doivent répondre aux exigences techniques de qualité et de sécurité requises.

La plateforme de télémédecine, ne doit, en aucun cas, constituer un support publicitaire pour les produits de santé ou un moyen orientant les patients vers tout prestataire de service de santé.

Art. 15 – Les exigences techniques et les exigences de sécurité des moyens utilisés dans la réalisation des actes de télémédecine et de conservation des données collectées sont fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et des technologies de la communication.

L’importation des outils individuels d’enregistrement et de transmission des données, utilisés par les patients est soumise à une autorisation de mise à la consommation conformément à la législation et la règlementation en vigueur.

Art. 16 – Les données traitées dans le cadre des actes de télémédecine, doivent être hébergées et stockées en Tunisie chez un prestataire de services Cloud et hébergement national conformément à la législation et la règlementation en vigueur en matière de sécurité informatique et de protection des données à caractère personnel.

L’accès aux données visées à l’alinéa premier du présent article se fait conformément à la législation en vigueur.

Les données relatives aux actes de télémédecine doivent être instantanément transférées et conservées dans le dossier médical électronique du patient stocké au niveau d’une base de données centrale auprès des services techniques relevant du ministère de la santé. Les caractéristiques techniques du dossier médical électronique sont fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et des technologies de la communication.

Les données traitées dans le cadre des actes de télémédecine effectués aux structures et établissements relevant du ministère de la défense nationale sont hébergées, conservées et transférées au niveau d’une base de données spécifique.

Art. 17 – Les versions numériques des comptes-rendus et des prescriptions médicales issues d’un acte de télémédecine doivent être renforcées par une signature électronique conformément à la législation et à la règlementation en vigueur.

Art. 18 – Les pharmaciens titulaires d’officines de détail peuvent, dans le cadre des actes de télémédecine, dispenser les médicaments, au public, hormis les médicaments du tableau B et les psychotropes soumis au contrôle du ministère de la santé, et ce sur prescription médicale électronique moyennant l’utilisation d’un système d’information sécurisé garantissant la protection, la sécurité et la fiabilité des documents et des données personnelles conformément à la législation en vigueur.

Les conditions et les modalités de dispensation de la prescription médicale électronique sont fixées par arrêté du ministre de la santé.

Section III – Les garanties de l’exercice de la télémédecine

Art. 19 – La réalisation de tout acte de télémédecine doit être effectuée dans un cadre garantissant :

– l’identification du patient moyennant l’utilisation d’un système d’information fiable et sécurisé,

– l’authentification des professionnels de santé participant à l’acte de télémédecine,

– l’information du patient de l’identité des professionnels de santé participant à l’acte de télémédecine,

– la qualité des soins et des actes médicaux fournis,

– l’accès nécessaire du professionnel de santé, selon la nature de son intervention, aux données médicales du patient, nécessaires pour la réalisation de l’acte de télémédecine,

– la préservation du secret médical relatif à la réalisation de l’acte de télémédecine,

– la possibilité, pour le malade, de s’abstenir à continuer le traitement à distance et de choisir un autre mode de soins,

– la conformité de la plateforme et de tous les outils informatiques utilisés à la législation en vigueur relative notamment à la sécurité informatique et à la protection de données à caractère personnel,

– la traçabilité de toutes les informations relatives à l’acte de télémédecine, et la conservation des données à caractère personnel pendant dix (10) ans, au moins. Ces données doivent être accessibles, après consentement du patient ou de son tuteur légal, au cas où le patient fait appel à un autre médecin pour faire un acte de télémédecine,

– l’interopérabilité, le transfert, l’échange et la réversibilité des données collectées, et ce, dans le cadre d’un standard qui permet leur exploitation par d’autres structures professionnelles responsables et/ou d’autres plateformes dûment autorisées,

– l’accès aux informations relatives à l’acte de télémédecine par les organes de contrôle et d’inspection dûment qualifiés.

Art. 20 – Les conditions et les modalités d’échange électronique des données entre les propriétaires de la plateforme de télémédecine et la caisse nationale d’assurance maladie, sont fixées dans le cadre des conventions conclues à cet effet entre les parties. Les dites conventions entrent en vigueur après leur approbation par arrêté du ministre chargé des affaires sociales.

Art. 21 – Avant la réalisation de tout acte de télémédecine, le consentement libre et éclairé du patient ou, le cas échéant, de son tuteur légal doit être recueilli et ce après son information de la nécessité, de l’intérêt, des conséquences et de la portée dudit acte ainsi que des moyens mis en œuvre pour sa réalisation.

L’information et le consentement libre et éclairé du patient ou de son tuteur légal doivent être matérialisés par tout moyen laissant une trace sur un support électronique et, au besoin, papier.

Art. 22 – Les données à caractère personnel du patient relatives à la santé recueillies lors de la réalisation d’un acte de télémédecine doivent être inscrites sous forme d’un rapport détaillé contenant, notamment, les informations suivantes :

– les données médicales relatives au patient, les actes médicaux réalisés et les prescriptions médicales rédigées à cet effet,

– l’identification des professionnels de santé impliqués dans la réalisation de l’acte de télémédecine,

– La date et l’heure de la réalisation de l’acte de télémédecine.

– Les incidents techniques éventuels survenus.

Les données susvisées ne sont accessibles à d’autres professionnels de santé qu’après autorisation explicite du patient.

Sous réserve de la législation en vigueur, est interdite au propriétaire de la plateforme de télémédecine, l’utilisation ou la gestion des données personnelles des malades relatives à la santé, recueillies lors de la réalisation des actes de télémédecine.

Art. 23 – Sous réserve de la législation et de la règlementation en vigueur relatives à la protection des données à caractère personnel, les professionnels de santé participant à la réalisation d’un acte de télémédecine doivent avoir le consentement de la personne concernée dudit acte, dûment informée, pour échanger les informations qui le concernent, notamment par le biais des technologies de l’information et de la communication.

Section IV – Les modalités de paiement et de rémunération des actes de télémédecine

Art. 24 – La tarification et les modalités de paiement des actes de télémédecine concernés par les dispositions du présent décret Présidentiel, sont fixés par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, des affaires sociales et des finances, après avis des ordres professionnels concernés.

La rémunération des actes de télémédecine réalisés dans le secteur public se fait conformément aux dispositions du décret n° 2001-318 du 23 janvier 2001, susvisé.

Art. 25 – Les tarifications des actes de télémédecine à destination de patients résidents à l’étranger, effectués par les professionnels de santé relevant du secteur public sont fixées dans le cadre des conventions établies à cet effet par les structures et les établissements sanitaires concernés.

Les tarifications des actes de télémédecine à destination de patients résidents à l’étranger, effectués par les professionnels de santé de libre pratique sont fixée dans le cadre des conventions établies à cet effet et qui doivent être visées par l’ordre professionnel concerné.

Chapitre IV

Dispositions finales et transitoires

Art. 26 – L’autorisation pour l’utilisation de la plateforme de télémédecine ou pour l’exécution du projet de coopération médicale est retirée par arrêté du ministre de la santé, en cas d’inobservation, dûment constatée, des exigences requises par les services compétents du ministère de la santé ou des autres ministères de tutelle sectorielle. L’autorisation est retirée temporairement ou définitivement.

Art. 27 – A titre exceptionnel et dans le cadre de la mobilisation des ressources humaines nécessaires pour faire face à la propagation du virus SARS-Cov2, et pour une période ne dépassant pas un an à compter de la date de publication du présent décret Présidentiel au Journal officiel de la République tunisienne, les téléconsultations au profit des personnes infectées par le Virus suivies à domicile ou après leur hospitalisation, sont assurées à titre gratuit.

La période visée à l’alinéa premier du présent article peut être prolongée, par arrêté du ministre de la santé, pour une durée allant de six (6) mois à un an et ce en fonction de l’évolution de la situation épidémique dans le pays.

Les médecins et les médecins dentistes tunisiens exerçant à l’étranger peuvent, pendant la même période, dans le cadre d’échanges d’expertise et pour faire face à la propagation du virus SARS-Cov2, être autorisés par le ministre de la santé, après avis des organismes professionnels concernés, à effectuer les actes de téléconsultation et ce à titre gratuit, à travers une plateforme dûment autorisée à cet effet en Tunisie.

Art. 28 – Les propriétaires des plateformes de télémédecine et les responsables des projets de coopération médicale en activité à la date de parution du présent décret Présidentiel, sont tenus de se conformer à ses dispositions dans un délai ne dépassant pas un an à compter de la date de son entrée en vigueur.

 

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La Rédaction 

 

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