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Peut-on parler d’industrie de noms de domaines en Tunisie ?

Peut-on parler d’industrie de noms de domaines en Tunisie ?

Depuis la libéralisation de la revente du .tn et du .tounes (ccTLD arabe de la Tunisie) à toutes les personnes morales, la Tunisie comptabilise en tout et pour tout 20 mille noms de domaines avec ces extensions nationales. Est-ce assez ? Est-ce un bon signe ? Comment booster cette activité pour encourager la création de contenu numérique en Tunisie ?

Peut-on parler d’industrie de noms de domaines en Tunisie ? Depuis la libéralisation de la revente du .tn et du .tounes (ccTLD arabe de la Tunisie) à toutes les personnes morales, la Tunisie comptabilise en tout et pour tout 20 mille noms de domaines avec ces extensions nationales. Est-ce assez ? Est-ce un bon signe ? Comment booster cette activité pour encourager la création de contenu numérique en Tunisie ?

C’est à ces questions qu’ont tenté de répondre les différents panélistes lors de la table-ronde organisée conjointement par l’Agence Tunisienne d’Internet (ATI) et l’Instance Nationale des Télécommunications (INT) au siège du Centre de promotion des exportations (CEPEX) le mardi 26 juin. 

Sihem Trabelsi, Chef division QoS à l’Instance Nationale des Télécommunications (INT), et après avoir exposé l’historique du .tn et les grandes étapes entreprises par le régulateur pour la libéralisation de ce ccTLD, a annoncé qu’une nouvelle consultation publique vient de se terminer et grâce à laquelle de nouvelles réformes vont être annoncées prochainement. Parmi lesquelles : un assouplissement des conditions d’octroi d’une licence de bureau d’enregistrement (BE) en .tn et en .tounes (le ccTLD arabe de la Tunisie). Elle a toutefois déploré la faible participation des actuels intervenants dans cette consultation publique exhortant les différents intervenants à envoyer leurs recommandations, même si on est arrivés à la date butoir.

Wafa Dahmani de l'ATI

Wafa Dahmani de l’ATI

Wafa Dahmani, Chef de département gestion des ressources de l’Internet chez l’Agence Tunisienne d’Internet (ATI), a pour sa part donné des chiffres intéressants sur l’évolution du .tn en Tunisie depuis son utilisation par les entreprises publiques et les administrations jusqu’à sa libéralisation totale en passant par l’exclusivité commerciale chez les Fournisseurs d’Accès Internet (FAI). 

«Depuis le début de sa libéralisation en 2010, le nombre des noms de domaine (NDD) en .tn a connu une augmentation exponentielle. Il est ainsi passé de 8,4 mille en 2010 à 11,4 en 2011 pour atteindre actuellement 17 mille», informe Mme Dahmani. «Topnet reste leader parmi les bureaux d’enregistrement à avoir le plus grand nombre de ces NDD, suivi par les autres FAI. Mais on doit saluer quand même l’effort d’OVH dont le nombre des NDD avec le ccTLD national a atteint un taux respectable de 4%».

«Le but ultime de ces réformes ? Promouvoir le .tn. Et on aimerait bien que les bureaux d’enregistrement nous aident dans cette tâche grâce aux promos ou en créant de la valeur ajoutée avec le .tn», regrette-t-elle. «C’est dommage que des BE leader n’aient même pas encore préparé une plateforme d’enregistrement en ligne, bien que celle de l’ATI est déjà opérationnelle depuis longtemps». 

Mais les regrets de l’ATI ont été accueillis par les critiques acerbes des présents, majoritairement des professionnels du domaine du Web. Ainsi des personnes se sont mises à tirer à boulets rouges sur l’INT qui «ne veut pas réduire le prix de revente du .tn pour s’adapter au pouvoir d’achat du Tunisien», ou encore l’ATI qui serait responsable du niveau bas du contenu numérique tunisien sur le Net.

Pour se défendre, Moez Chakchouk, PDG de l’ATI (venu assister au premier panel comme modérateur), a répondu que «le prix de vente de gros d’un NDD en .tn est de 10,280 dinars dont 10 partent chez l’INT comme frais de gestion. Malgré ça, nous allons encore réduire le prix». 

D’après le PDG de l’ATI, l’agence n’est pratiquement pas gagnante avec le .tn et est carrément prête à réduire sa marge à néant tant que ça permettra la promotion du contenu numérique national à l’échelle internationale. C’est pourquoi un projet d’installation de sécurisation des DNS tunisiens sur le continent africain est en cours d’étude.

Et pour réduire la sortie de devises pour le rachat des noms de domaines génériques (comme le .com ou .net), M. Chakchouk annonce que l’ATI sera très prochainement un BE de ces gTLD auprès de l’ICANN. Le monde entier pourra ainsi acheter directement, et en monnaie étrangère, auprès de l’ATI. Quant aux bureaux d’enregistrement tunisiens, ils pourront, de ce fait, commander directement leur gTLD en Tunisie au lieu de les payer en dollars ou en euros.

«Regardez en France, le .fr est vendu à 1 euros. Et pourtant, ils ont un pouvoir d’achat bien meilleur que le nôtre», interpelle pour sa part, Walid Kerkeni, membre de l’ISOC tunisien et general manager de Web informatique. C’est là que Hamza Aboulfeth, CEO de Genious Commnication, une boite leader d’hébergement et d’enregistrement des NDD au Maroc, est intervenu pour comparer entre le Royaume Chérifien et le pays des Jasmins : «Nous sommes un bureau d’enregistrement accrédité de l’ICANN et je peux vous dire que le prix de vente de gros du .tn est pratiquement le même que le gTLD internationaux, soit à 5 euros. Chez nous, le .ma est vendu à 15 euros. Et même si le nombre des ccTLD marocains dépasse de loin ceux de la Tunisie, il faut savoir que ceci n’est que de la poudre aux yeux car chez nous on l’offre gratuitement avec les abonnements Internet».

Hamza Aboulfeth, CEO de Genious Commnication

Hamza Aboulfeth, CEO de Genious Commnication

«J’aurais vraiment aimé avoir chez nous une ‘ATI’ comme vous l’avez ici. Au Maroc, c’est l’opérateur historique qui a le monopole du .ma. Rien que pour changer les DNS, il faut envoyer un fax puis appeler derrière pour être sûr qu’il est bien arrivé à destination. Et si vous faites votre requête le vendredi, faudra attendre lundi pour qu’on procède aux modifications», rajoute-t-il. Et au sujet du prix du .fr à 1 euro, M. Aboulfeth s’est un peu étonné d’une telle remarque. «Il y a des frais de gestion minimaux et au-dessous desquels il sera difficile d’avoir une qualité de service. De plus en France, c’est presque 24 millions de NDD en .fr qui sont commercialisés. Ici en Tunisie, vous avez à peine 20 mille».

La représentante de l’INT a parlé de l’importance de la résolution des litiges relatifs aux NDD dans la réussite du .tn : «Nous avons déjà eu affaire à deux plaintes dont une a été réglée». Une première en Tunisie. L’autre étant déjà en cours de résolution, le nombre des plaintes reste, heureusement, assez faible depuis le lancement de ce ccTLD national. Et pour cause : les phases Sunrise 1, 2 et 3 ont permis de préserver le .tn du cyber squattage. Quant aux noms des gouvernorats et du pays, l’ATI les a déjà réservés en .tn.

Mais quid de Tunisie.com ou Tunisie.co ou encore Tunisie.fr, ces NDD ne sont plus la propriété de l’Etat et n’importe qui peut l’acheter pour y mettre ce qu’il veut. Le Tunisie.co, par exemple, a été racheté par un éditeur de site touristique tunisien à 3 mille dinars de chez Walid Kerkeni (qui l’a réservé auparavant à titre personnel). Le Tunisie.fr, quant à lui, tente de promouvoir le tourisme tunisien auprès des francophones.

Mais si un esprit malveillant tente de racheter ces NDD pour nuire à l’image de la Tunisie ? Et en perdant le contrôle de ces gTLD et ccTLD, notre pays ne risque-t-il pas de renvoyer une mauvaise image aux Webmasters et clients potentiels ? Avons-nous, de ce fait, une chance de propulser l’industrie des noms de domaine en Tunisie ? 

Welid Naffati

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