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Pourquoi Tunisie Telecom n’a pas encore mis fin à sa redevance ADSL ?

Le 10 août dernier, Ali Ghodhbani, PDG de l’opérateur historique, annonçait la fin de la redevance ADSL de Tunisie Telecom et le début d’une ère nouvelle dans le secteur des télécoms (voir notre article). De son côté, l’Instance nationale des télécommunications (INT) a dicté à TT le lancement d’une offre qui satisfait cette condition : l’ADSL Bitstream.

Un petit rappel des faits : le 20 juillet dernier, l’Instance Nationale des Télécommunications a publié une décision visant à approuver l’offre de référence du Bitstream national de Tunisie Telecom pour l’année 2011 (lire ceci). Cette décision publiée sur le site officiel de l’INT devait être opérationnelle au plus tard deux mois après sa date de publication, soit le 20 septembre dernier.

Seulement voilà, près de 3 mois après cette annonce, il semble que rien n’ait changé. Tunisie Telecom reste encore le seul opérateur à avoir l’exclusivité d’accès à son réseau Data (et fixe). En effet, et jusqu’au moment de la rédaction de cet article, aucun fournisseur d’accès Internet de la place, et encore moins l’opérateur Orange Tunisie, n’a le droit d’y toucher.

Pour les FAI, ce retard ne cause pas vraiment de pertes réelles. Ils continueront toujours à commercialiser la forme classique de l’ADSL sous le monopole de Tunisie Telecom. Mais ce n’est pas le cas pour le concurrent de TT, à savoir Orange Tunisie.

Rappelons à cet effet que le nouvel opérateur s’est engagé envers l’Etat à lancer son service fixe un an au plus tard à partir de la date de son lancement commercial. Nous sommes maintenant à presque 2 ans depuis que Orange est né.

Les tarifs du fixe doivent augmenter pour bénéficier du téléphone illimité

Le temps court. Plus d’un mois s’est écoulé depuis la date d’échéance fixée par le régulateur. Tunisie Telecom n’a toujours pas obtempéré malgré les relances faites par les fournisseurs d’accès Internet et les risques de sanctions prévues dans le Code des Télécommunications.

Nous avons appris de source officieuse que le régulateur a lancé plusieurs invitations à Tunisie Telecom pour constituer un groupe de travail ayant pour mission la mise en place effective du Bitstream dans le délai imparti, sans jamais trouver de réponse de sa part.

La question qui se pose dans ce contexte est : Comment l’opérateur historique peut-il refuser de la sorte l’accès aux FAI et à Orange, mettant ainsi en péril les enjeux d’une concurrence saine du marché et ce, en toute impunité ? Réponse : C’est à cause des prix appliqués actuellement sur la téléphonie fixe (tarifs de la minute d’appel et les frais d’entretien).

En effet, l’opérateur historique conteste l’offre tarifaire de l’ADSL Bitsream car ceci ne fera qu’enfoncer davantage la branche fixe de TT, déjà déficitaire (voir cet article). De ce fait, TT tente par tous les moyens que l’Etat la soutienne dans la révision de ses prix sur le fixe -des tarifs qui seront, bien évidemment, revus à la hausse-, quitte à bloquer le dossier du dégroupage et du Bitstream.

Tunisie Telecom, la rebelle

Il semble donc que la rébellion de Tunisie Telecom à l’encontre du régulateur ait porté ses fruits étant donné qu’aucune mesure n’a été entreprise jusqu’ici par l’Instance pour contraindre Tunisie Telecom à appliquer la décision n°38.

La situation est donc gênante pour TT et Orange. Mais elle est également très contraignante pour l’INT qui ne sait plus où se donner de la tête pour satisfaire tout le monde.

Faut-il aider Tunisie Telecom à sauver son fixe tout en laissant Orange «hors la loi» ? Ou faut-il régulariser la situation de cette dernière avec l’Etat et lui donner le droit d’exploiter le fixe comme le stipule sa licence au dépend de la pérennité financière de l’opérateur historique ?

Mais par dessus tout, quid du client final ? Le Bitstream est la condition sine qua non pour l’émergence de nouveaux services (tels que la VoIP, la TV On Demand, etc.) et de réduire, ainsi, et d’une façon considérable, le prix des télécommunications en Tunisie (abonnement Internet, facture du téléphone, etc.).

Mieux encore : la démocratisation de ces nouveaux services vont induire l’émergence de nouvelles startups (développement logiciel, création de contenu, etc.). Or l’équation est connue : plus d’entreprises = plus d’emplois. Et à la lumière de la conjoncture par laquelle passe la Tunisie actuellement, on ne peut s’en priver.

La TTBox pour débloquer la situation ?

Comme il est déjà expliqué ci-dessus, le dossier du Bitstream est donc devenu un vrai casse-tête chinois pour le régulateur. Un régulateur qui cherche à installer un climat de concurrence saine et prospère dans le microcosme des télécoms en Tunisie.

Or, Tunisie Telecom prépare le lancement (on parle de janvier 2012) d’une TTBox via sa filiale, le FAI Topnet (lire notre information sur le sujet). Ca sera ainsi la première offre de «convergence» du marché disponible de manière régulière et continue.

Et quand on se rappelle que cette même INT a contraint Orange à retirer en mai dernier son offre convergente «Livebox» pour cause «d’irrégularité», on peut se demander si le régulateur va en faire de même avec Tunisie Telecom.

Sans être sur le qui-vive et accuser à tord l’Instance de favoritisme, on se demande tout de même si l’INT n’est pas en train d’offrir la primauté de la VoIP pour le grand public à Tunisie Telecom, histoire de faire oublier l’épineux dossier des tarifs du fixe, source de tous les maux de têtes.

Certes, tous les efforts de l’instance sont louables, surtout dans une telle conjoncture. Mais en absence d’une solution catégorique à ce problème du Bitstream, ce statu quo finira par plomber tout un secteur aussi stratégique que les télécoms et ce, dans un pays où l’économie est encore chancelante.

Welid Naffati

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