Faire peur, terroriser, jouer sur les nerfs et diffuser des intox à tout va. Ce sont les recettes qu’utilise Ennahdha depuis quelques jours pour dissuader les gens de descendre dans la rue pour manifester. Depuis la publication de la première partie de cet article, le mouvement social n’a pas cessé de gonfler dans la capitale et dans les régions appelant à la chute du gouvernement. Pour d’autres, comme le sit-in du Bardo, il va au-delà en demandant carrément la dissolution de l’Assemblée nationale constituante (ANC).
Faire peur, terroriser, jouer sur les nerfs et diffuser des intox à tout va. Ce sont les recettes qu’utilise Ennahdha depuis quelques jours pour dissuader les gens de descendre dans la rue pour manifester. Depuis la publication de la première partie de cet article, le mouvement social n’a pas cessé de gonfler dans la capitale et dans les régions appelant à la chute du gouvernement. Pour d’autres, comme le sit-in du Bardo, il va au-delà en demandant carrément la dissolution de l’Assemblée nationale constituante (ANC).
Face à l’ampleur du mouvement, Ennahdha -d’une façon officieuse-, ne cesse de chercher des stratagèmes pour discréditer ses adversaires et les contrer. Quitte à utiliser les SMS en plus de leurs pages Facebook, chaines de télévision et portails d’information.
Le 28 juillet, juste au début du mouvement dans plusieurs gouvernorats, notamment à Tunis et à Sfax, des «comptes anonymes» Facebook et Twitter ont commencé la diffusion d’une pluie d’informations mettant en garde les manifestants contre une éventuelle attaque des membres des Ligues de protection de la révolution (Lpr), milice d’Ennahdha. Plusieurs personnes affirment avoir reçu dans leur messagerie, un SMS dans ce sens.
Des sitineurs ont reçu un SMS viasant à terroriser les gens pour qu’ils ne manifestent pas
Mais au lieu de faire fuir les gens, c’est totalement l’inverse qui s’est passé. Les appels au secours des sit-tineurs demandant des renforts n’ont fait que multiplier le nombre des participants au «Sit-in du Départ». Le Bardo, par exemple a enregistré à lui seul 15 mille manifestants contre 4 mille du côté des nahdhaouis venus défendre la «légitimité électorale».
C’est ainsi que les pages nahdhaouies ont changé de stratégie annonçant une attaque terroriste imminente sur les sit-tineurs appelant les Facebookeurs à la vigilance et à diffuser l’information.
Une page non officielle d’Ennahdha annonce un attentat terroriste imminent sur les manifestants
Une autre page nahdhaouie (Tunisialeaks) a annoncé pour sa part une attaque salafiste sur les manifestants. Mais au lieu d’uploader une photo de présentation de la publication (du style ‘Urgent’ comme ils ont l’habitude de le faire), l’administrateur de la page a commis une bourde en uploadant plutôt une capture de son… écran.
L’administrateur de la page nahdhaouie de propagande TunisiaLeaks télécharge accidentellement une capture de son écran
pour annoncer une attaque salafiste imminente (Cliquez pour agrandir)
En analysant les onglets ouverts dans son navigateur, l’administrateur s’avère être un riverain de Tunisia-Sat (3 onglets ouverts). Ce forum de troll et de piratage (vente d’abonnements dreambox, crack software, etc.) majoritairement arabophone, est très visité par les Tunisiens. Mais depuis la chute de Ben Ali, les administrateurs de Tunisia-Sat n’arrêtent pas de faire un travail de propagande pour le parti islamiste au pouvoir.
Autre donnée intéressante : un onglet affiche «Radio Zitouna». Une radio FM islamiste qui roule pour le parti islamiste. Et enfin : le photoshop qui fonctionne en background.
Ne voyant pas de résultats à ces manipulations, les nahdhaouis sur les réseaux sociaux ont alors changé de stratégie. Surtout après l’assassinat de 8 soldats au Mont Chaambi : diffuser les images des manifestants anti-gouvernement comme étant des manifs contre le terrorisme et en soutien au gouvernement.
Des images du sitin anti-gouvernement diffusées par les Pro-Nahdha sur facebook comme étant des manifs Pro-gouvernement
Et dans le but de discréditer les opposants, la machine de propagande d’Ennahdha sur les réseaux sociaux a réduit le conflit à une affaire de religion et à la théorie islamiste «si tu es contre moi, tu es alors contre l’islam».
Capture d’écran d’une vidéo intitulée : “Ce n’est pas une guerre contre Ennahdha, mais plutôt contre l’Islam.
Et nous sommes prêts à mourir s’il le faut. On n’abandonnera pas !”
Mais puisque le ridicule ne tue pas, le ministère des Affaires religieuses tunisien s’est basé sur l’une des vidéos fabriquées par les officines du parti à Montplaisir, QG du parti de Rached Ghannouchi, pour dénigrer les sit-ineurs anti gouvernement au Bardo en les accusant, implicitement, de mécréants (voir ce lien).
Ce nivellement par le bas, ne s’est pas arrêté là. Les pages Pro Ennahdha sur Facebook ont produit une vidéo truquée d’Aymen Al Dhawahri, successeur de Oussama Ben Laden à la tête d’Al Qaïda, soi-disant diffusée par Al-Jazeera pour revendiquer les attentats de Chaambi. Sur la bande d’en bas, nous lisons (juste à coté du logo d’Al-Jazeera): «Aymen Al Dhawahri affirme avoir chargé les hommes d’Al Qaïda en Tunisie, Beji Caid Essebsi (président du parti rival à Ennahdha, Nidaa Tounes, ndlr) et Houcine Abbassi (secrétaire général de la centrale syndicale UGTT), pour faire plusieurs actes terroristes en Tunisie contre les militaires et les forces de l’ordre». On notera en passant que la voix ne correspond pas au mouvement des lèvres.
La vidéo truquée du chef d’Al Qaïda
Un montage grossier qui prouve le désespoir du mouvement islamiste face à la contestation sociale grandissante au Bardo et dans chaque gouvernorat (leur siège à Bizerte a été saccagé la nuit du 30 au 31 juillet).
Mais cet état de panique est paru encore plus flagrant avec le communiqué de Rached Ghannouchi, président du mouvement islamiste Ennahdha sur sa page facebook, diffusé hier mardi 30 juillet. Mais avant, rappelons que l’attaque terroriste de Chaanbi s’est passée lundi 29 juillet, presque à une heure de la rupture du jeûne (vers 18h30).
Dans le communiqué, on lit : «Tunis le 30/07/2013. Communiqué. Nous, les partis politiques et les personnalités nationales, nous nous sommes rencontrés ce lundi 29 juillet 2013, dans une réunion consultative à propos de la situation générale dans le pays, surtout après l’assassinat du martyr Mohamed Brahmi et le crime odieux commis au Mont Chaambi à l’encontre de nos braves soldats, nous déclarons ce qui suit… ». Or, cette réunion s’est déroulée le lundi en début d’après midi, soit avant l’attaque terroriste. Et avant même le discours de Ali Laarayedh, président du gouvernement, où il a martelé qu’il n’allait pas démissionner. Pourtant, dans le communiqué, Rached Ghannouchi et ses 17 partis politiques alliés, affirment être d’accord sur la formation d’un gouvernement de salut national. Cherchez l’erreur !
Le communiqué de Rached Ghnnouchi
Pire encore : parmi les signataires, on trouve le parti UPL de Slim Riahi. Contacté par nos soins, Souheil Alouini, secrétaire général du parti, infirme avoir signé quoique ce soit. «Ennahdha nous a invité à cette réunion consultative le lundi. Nous avons accepté car nous privilégions toujours le dialogue surtout en ces temps graves par lesquels passe le pays. C’est Hmed Kadidi, Vice-président de l’UPL, qui a assisté à la réunion et a exprimé la position du parti qu’est la dissolution du gouvernement pour en créer un autre plus réduit constitué de compétences neutres et qualifiées ainsi qu’une limitation des prérogatives de l’ANC jusqu’à la date du 23 octobre prochain. M. Kadidi n’a rien signé et n’a même pas été au courant qu’Ennahdha allait publier un communiqué. Le sujet du Mont Chaambi n’a même pas était abordé lors de la réunion puisque elle s’est terminée à 17h !». Soit une heure et demie avant l’embuscade ayant fait 8 morts de l’armée.
Un autre détail dans le communiqué du mouvement islamiste démontrant bien le désespoir et l’état de panique dans lequel vit le parti depuis le début des contestations. Dans la liste des partis signataires, Rached Ghannouchi a intentionnellement mis le nom du Parti Républicain Libéral (PRL) en première position au lieu d’Ennahdha. Rappelons que le PRL s’appelait jusqu’à peu Parti Maghrebin Liberal.
En terme de communication, le fait de mentionner le Parti Républiciain Libéral en premier, Ennahdha visa à brouiller les esprits sur un rapprochement avec le Parti Républicain présidé par Maya Jeribi et qui a exprimé clairement sa position dimanche dernier : dissolution du gouvernement et de l’ANC.
Jamais la machine de propagande d’Ennahdha n’a connu autant d’effervescence que ces jours-ci. Mais avec la précipitation et la panique, les officines du parti de Rached Ghannouchi multiplient les faux pas. Signe de détresse, le parti au pouvoir tente par tous les moyens de gagner du terrain, quitte à faire régner la peur…
Welid Naffati
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