Le secteur de l’hôtellerie a sauté le pas de la digitalisation avec l’arrivée, sur le marché des OTA (Online Tourism Agencies) tels que Booking.com et Expedia. Ces modèles, digitalisés, ont sonné le glas des modèles classiques des voyagistes. Le premier à avoir cédé est le voyagiste britannique, Thomas Cook. Le plus ancien et plus grand des tours opérateurs dans le monde a annoncé, la semaine dernière, sa faillite en Angleterre, laissant derrière lui une ardoise de plusieurs milliards d’euros d’impayés dans certains pays, notamment, la Tunisie.
Pour en parler, Marwen Dhmayed et Walid Naffati ont invité, dans ce 85e épisode de Startup Story, Mouna ben Halima, membre du bureau exécutif de la Fédération Tunisienne de l’Hôtellerie (FTH) et fondatrice de l’hôtel La Badira, et Lotfi Mansour, fondateur de TunisiaTourism.info, un portail dédié à la promotion du tourisme local.
Les tours opérateurs Vs les OTA
Dans un monde où le consommateur est de plus en plus connecté, de plus en plus digital et friand de packages dynamiques et personnalisés, les OTA ont construit un modus operandi très lucratif. D’une part le consommateur voit défiler en un clic une panoplie de vols, d’excursions et d’hôtels auxquels il n’aurait probablement pas pensé, et d’autre part, l’hôtelier voit ses chambres se remplir avec une clientèle qu’il n’aurait peut-être pas pu avoir. Et derrière, les OTA se remplissent les poches en touchant des commissions sur les réservations.
Les voyagistes a.k.a les tours opérateurs procèdent, eux, de manière différente. Leur modèle repose essentiellement sur les compagnies aériennes et chaînes d’hôtels dont ils sont propriétaires ou locataires. L’idée est simple : remplir au maximum en vendant des séjours individuels ou collectifs à un prix tout compris.
Ce modèle connaît aujourd’hui un flop retentissant et a même perdu en parts de marché. Selon Lotfi Mansour, « les OTA et les tours opérateurs se partagent actuellement le marché mondial du tourisme à 50/50 ».
La Tunisie, loin d’être prête aux OTA
Les hôteliers tunisiens ont fait le choix, depuis des décennies, de suivre le modèle des tours opérateurs. Dans l’absence d’une vision basée sur l’innovation et le numérique, les hôtels tunisiens sont restés prisonniers de ce modèle classique aujourd’hui obsolète. Selon Lotfi Mansour « peu sont ceux qui disposent de sites internet ou de pages sur les sites des OTA ou des sites spécialisés dans les excursions » alors que la nouvelle génération de consommateurs est à la recherche de nouvelles expériences et fuit le « tout inclus ».
L’Open Sky, une solution aux maux du tourisme tunisien ?
Si les hôteliers tunisiens sont prisonniers du modèle classique des voyagistes c’est, entre autres, à cause de son ciel fermé. Face au blocage du côté européen et les menaces de grève récurrentes du syndicat des agents de la compagnie nationale – actuellement en grande difficulté financière – les accords sur l’Open Sky sont restés dans un tiroir fermé à double tour.
« Sans Open sky, les hôteliers n’ont pas d’autres choix que de collaborer avec les tours opérateurs. Ils ne peuvent pas attirer les clients avec, uniquement, leurs propres moyens », selon Mouna ben Halima.
La mutation serait, cependant, en marche. D’après Mouna Ben Halima, face à la crise qui a secoué l’industrie touristique après les attentats de 2015, plusieurs hôteliers se sont tournés vers la création de sites web et les réservations directes sans l’intermédiaire des tours opérateurs qui, à l’époque, avaient tourné le dos à la Tunisie.
Pour plus de détails, veuillez écouter l’interview en cliquant ici.
Nadya Jennene