Le Centre des Exportations de Tunis (CEPEX) a accueilli, hier, la 3ème édition des Journées Arabes de la Sécurité dans les Espaces Cybernétiques, organisée par le laboratoire des lois de relations extérieures, du marché et des négociations, ainsi que l’Observatoire Arabe pour la Sécurité de l’Espace Cybernétique. Ces journées viennent dans un contexte où tous les experts ont tiré une sonnette d’alarme sur la situation sécuritaire en ligne.
Aucune protection juridique fiable pour les réseaux sociaux
L’un des sujets de préoccupation sécuritaire qui touche une grande partie des utilisateurs du net reste sans doute les réseaux sociaux. En raison de leur grande popularité, notamment en Tunisie, où on recense à titre d’exemple plus de 3 millions d’utilisateurs sur Facebook, les risques d’atteinte à la vie privée sont grandissimes. A ce sujet, l’Instance Nationale de Protection des Données à Caractère Personnel, représentée par le juge Mohamed Kadhem Zine El Abidine, nous a précisé que la justice classique n’a généralement pas d’influence dans la justice en ligne, en raison d’un vide juridique « imposé » par les géants des réseaux sociaux. Malgré le fait que la réglementation interne de ces sites est claire vis-à-vis de la protection des données privées, celle-ci est tout le temps bafouée. Il n’y a qu’à voir le nombre effarant de publications affichant des photos, des vidéos ou des citations provenant d’autres personnes sans demander leurs avis, pour preuve. Selon M. Kadhem, la simple publication de ces photos peut constituer une atteinte à la vie privée, et est punie par la loi, en théorie du moins.
Le Droit à l’oubli, un droit sacré à défendre
Car le nombre d’infractions liées aux utilisations de Facebook ou Twitter sont énormes. Depuis le 14 janvier surtout, grand nombre de personnes ont été attaquées, harcelées, diffamées ou insultées sur ces réseaux. L’impunité des personnes fautives a laissé libre champ à ces «criminels» pour persévérer encore et encore dans leurs crimes, comme nous l’a indiqué le membre de l’Instance fondée par le juge Mokhtar Yahyaoui. Les utilisateurs doivent être capables d’archiver, de modifier et même de supprimer toute information relative à eux, dans le cadre de ce qu’il considère comme le Droit à l’oubli. Prenant le cas d’une ancienne actrice pornographique, qui, après avoir arrêté sa carrière, a voulu effacer cette image de starlette du X, il nous explique que cette dernière a pu obtenir gain de cause en justice pour effacer au moins tout référencement à son sujet.
Les Etats européens VS les USA
La plus grande contrainte entravant la protection des données reste sans doute le système juridique américain. Conçu de façon à protéger les grandes firmes, ce dernier n’est pas capable de faire pression sur les réseaux sociaux en matière de protection de données privées. C’est pour cela qu’un comité d’Etats, le G29, qui regroupe des pays européens a été créé pour s’activer en matière de protection de données. M. Kadhem nous a précisé que parmi les réclamations de l’Instance de protection des données personnelles figure donc le respect des décisions de ce G29, surtout concernant la protection des enfants, qui peuvent être cibles d’attaque, de détournement, voir même de pédophilie et pornographie infantile, et ce en toute immunité à cause du vide juridique.
Une préoccupation majeure donc, qui vient dans un contexte assez flou. En effet, la justice n’a pas été totalement absente en Tunisie, nous rappelons la condamnation des 2 jeunes tunisiens pour outrage au prophète Mohammed, après des publications sur Facebook et sur des blogs. Seulement, le fait d’avoir condamné uniquement ceux-là, et uniquement sur des bases éthiques, alors que de plus grands crimes ont été commis, coûtant même la vie de certains, laisse vivaces des questions sur la manière dont la justice opère, qui semble «sélective» à souhait. Une réforme urgente s’impose donc, pour que tout le monde puisse jouir de Facebook et autres en toute sécurité, sans mettre sa vie et sa sécurité personnelle en danger.
Seif Eddine Akkari