«Quand tu as été séquestré par la police politique à cause de ton activisme sur le Net sous Ben Ali, puis enfermé dans les geôles du ministère de l’Intérieur, sois sûr tu en garderas des séquelles pour toute ta vie», déclare Sofiene Bel Hadj, alias Hammadi Kaloutcha, lors de la table-ronde sur le cyberactivisme, qui s’est déroulée le jeudi 26 septembre à la maison de la culture Ibn Khaldoun à Tunis, dans le cadre de la 2ème édition du Festival International du Film des Droits de l’Homme.
«Quand tu as été séquestré par la police politique à cause de ton activisme sur le Net sous Ben Ali, puis enfermé dans les geôles du ministère de l’Intérieur, sois sûr tu en garderas des séquelles pour toute ta vie», déclare Sofiene Bel Hadj, alias Hammadi Kaloutcha, lors de la table-ronde sur le cyberactivisme, qui s’est déroulée le jeudi 26 septembre à la maison de la culture Ibn Khaldoun à Tunis, dans le cadre de la 2ème édition du Festival International du Film des Droits de l’Homme.
Animée par le journaliste et activiste Thameur Makki, cette table-ronde a été précédée par la projection de la 2ème partie du documentaire «Mémoire en risque», appelée «A l’ombre du masque», réalisé par Thameur Makki et Karim Bouzouita et financé par le Labo Démocratique (cliquez ici pour regarder le documentaire). Un documentaire qui parle de l’activisme sous l’ère Ben Ali, notamment sur le Net.
«Moi, je sais que la prison est faite pour les délinquants et les terroristes. Et non pour les artistes et les intellectuels», s’indigne pour sa part Asma Moussa, une cyber activiste présente dans le panel et qui vient tout juste d’arriver de Hammamet après avoir assisté au jugement en appel du rappeur Klay BBJ. Ce dernier a été condamné à 6 mois de prison fermes pour avoir critiqué la police. «Aujourd’hui, et malgré les campagnes que je mène sur facebook pour défendre la cause de toutes ces personnes qu’on essaye de réprimer, je vois que les gens baissent les bras. Rien que ce matin, il y a eu très peu d’artistes qui sont venus manifester devant le tribunal. Ils ont peur !», rajoute-t-elle, désespérée et révoltée.
«Ce qui me met hors de moi, c’est de voir ceux qui traquaient mes traces, qui écrivaient des rapports sur moi et qui ont participé à ma séquestration dans les geôles du ministère de l’Intérieur, reprendre une vie normale après la chute du régime. L’un d’eux est devenu un des administrateurs d’une boite de nuit branchée à la Marsa», raconte pour sa part Sofiene Bel Hadj. «Tous mes amis y vont et il a le culot de leur offrir des pots comme si de rien n’était. Ce même type s’est chargé de mon interrogatoire pendant ma détention au ministère de l’Intérieur.
Non je ne peux pas oublier. C’est vrai qu’on ne m’a arrêté que pour 4 jours. Mais en parlant avec ceux qui ont été torturés là-bas pendant de longues semaines, j’ai découvert que nous partageons les mêmes traumas».
Quand nous avons interpelé M. Bel Hadj en lui demandant le nom de cette personne, il n’a pas hésité un instant et a répondu dans un ton qui cache beaucoup de rage et de haine : «Il s’appelle Sofiene. Comme moi. Mais tout le monde l’appel Zof».
Quant à, Skander Ben Hamda, alias Bullet Skan, il a décrit le même procédé dans son processus d’arrestation avant le 14 janvier 2011, au ministère de l’Intérieur. Un cyber policier a suivi toutes ses activités pendant plusieurs mois jusqu’à ce qu’il a pu prouver la relation de Skander avec le groupuscule Takriz.
«Aujourd’hui, la méthode n’a pas changé. Avant, nous avions une cyberpolice à la solde de Zaba. Maintenant, ce sont plusieurs cyber milices qui s’activent sur le Web pour le compte des partis politiques. On est arrivés à fouiller dans mes photo facebook pour que Khmaies El Majeri (prédicateur extrémiste à la solde d’Ennahdha, ndlr) en choisisse une où je tenais une cartouche utilisée par la police de Ben durant la repression policière. Il l’a présenté dans une émission télé en m’accusant de terrorisme», se rappelle-t-il.
Sur le rapport de ces cyber-activistes avec les Médias, Sofiene Bel Hadj n’a pas caché son indignation face aux médias dits professionnels qui diffusent les intox : «Ca me rappelle l’époque où les sbires de Ben Ali m’envoyaient des intox dans le but de me discréditer». Il s’est également désolé de constater un désenchantement du Tunisien face à ce qui se passe dans le pays. Le citoyen évite maintenant de lire et de chercher l’information car c’est trop déprimant. «A ces personnes je dis : c’est très facile. Fermer facebook, éteignez votre télé et n’écoutez plus la radio. Là vous allez vivre dans votre monde du ‘tout est beau, tout est bien’. Un monde à la Ben Ali !», conclut-il.
Avec le retour des pratiques de Ben Ali (jugement d’intellectuels, artistes, syndicalistes, etc.), Sofiene Bel Hadj pense sérieusement à reprendre le cyber activisme, notamment le blogging. Il a encouragé tous les Tunisiens à faire de même.
Welid Naffati