Plusieurs chefs d’entreprises, de cliniques, de centres commerciaux, de supermarchés et des représentants légaux d’administrations peuvent être arrêtés et emprisonnés après le 30 septembre 2015. C’est l’information qui a fait l’effet d’une bombe et qui a été lâchée par Chawki Gaddes, le président de l’Instance Nationale de Protection des Données Personnelles (INPDP), lors d’un séminaire sur la Cybersécurité organisé par l’Agence Nationale de Sécurité Informatique (ANSI) jeudi 27 août à Gammart (Banlieue de Tunis).
Plusieurs chefs d’entreprises, de cliniques, de centres commerciaux, de supermarchés et des représentants légaux d’administrations peuvent être arrêtés et emprisonnés après le 30 septembre 2015. C’est l’information qui a fait l’effet d’une bombe et qui a été lâchée par Chawki Gaddes, président de l’Instance Nationale de Protection des Données Personnelles (INPDP), lors d’un séminaire sur la Cybersécurité organisé par l’Agence Nationale de Sécurité Informatique (ANSI) jeudi 27 août à Gammart (Banlieue de Tunis).
«Je vous ai dis que ma présentation vous coupera l’appétit», a-t-il rajouté tout juste après. Sa présentation, la dernière du séminaire, juste avant la pause déjeuner, a, justement, paralysé toute la salle qui d’habitude commence à s’impatienter à l’approche de l’heure du déjeuner, surtout si la conférence a pris du retard.
Prison ferme pour une caméra non déclarée et/ou une donnée confidentielle perdue
«Nous avons environ 100 articles juridiques sur le traitement de la donnée personnelle. Elles composent la loi 83 du 21 juillet 2004. C’est une loi qui est presque aux normes internationales», a expliqué Chawki Gaddes en présentant la vision de l’Instance au sujet de la protection des données dans la stratégie de cybersécurité. «Mais indépendamment du texte de loi, il faut établir une relation de confiance entre celui qui fournit la donnée et la partie qui la traite si on veut réussir le passage au tout numérique avec le projet Tunisie Digitale».
Chawki Gaddes au micro répondant aux questions des présents à propos des peines de prison
Mais un problème se pose. Malgré la loi de 2004 qui impose aux entreprises et administrations publiques de déclarer à l’Instance les données privées de ses clients ou même de déclarer les caméras de surveillance installées, pratiquement aucune d’elles ne respecte cette loi. Et pourtant, cette dernière prévoit des peines de prison aux représentants légaux de ces entités, surtout en cas de perte de ces données ou de non respect de leur caractère confidentiel.
Dernier délais le 30 septembre 2015
«Dans mes principes, je suis contre l’idée de priver les gens de leur liberté. Mais malheureusement, il faut appliquer la loi en attendant sa révision. C’est pourquoi j’ai envoyé plusieurs centaines de faxes à plusieurs administrations, entreprises et cliniques leur rappelant de prendre contact avec l’Instance et de régulariser leur situation avant le 30 septembre prochain», a-t-il affirmé. Mais que ce se passera-t-il au delà de cette date ? «L’Instance transfèrera les dossiers au procureur de la République qui appliquera les peines mentionnées dans la loi de 2004. C’est à dire un an de prison ferme et 1000 dinars d’amende».
Le président de l’Instance a promis également de donner aux médias lors d’une conférence de presse la liste nominative des entreprises et d’administrations qui n’ont pas répondu favorablement aux faxes de l’Instance avant le 30 septembre prochain. «Comment voulez-vous qu’on parle de respect de l’Etat et de son prestige si on laisse chacun faire à sa guise ? Comment voulez-vous que les entreprises étrangères aient confiance en nous et externalisent le traitement et l’hébergement de leurs Data chez nous ?», s’est indigné Chawki Gaddes devant les présents. L’Union Européenne interdit, en effet, que les données sur leurs citoyens ne soient transférés en Tunisie à cause, justement, d’un manque de confiance total dans le respect de la confidentialité de ces données et de leur sauvegarde. Du coup, beaucoup d’entreprises Offshore, notamment européennes, hésitent à ouvrir une filiale en Tunisie. «En appliquant la loi et en envoyant des dossiers devant le procureur de la république, on adressera un message fort à ces entreprises en attendant l’adhésion de la Tunisie à la convention 108», a-t-il affirmé. Une demande a été déposée dans ce sens le 5 mai dernier par la Présidence du gouvernement auprès du Conseil de l’Europe. Septembre prochain, le Conseil va étudier la demande et va certainement noter quelques défaillances (notamment sur le plan juridique). Le président de l’Instance s’attend, donc à ce que la Conseil accorde un moratoire à la Tunisie pour corriger ces failles avant de réexaminer le dossier.
Des amendes et des peines de prison pour les personnes physiques
Entre temps, l’Instance travaille sur un nouveau projet de loi qui colmate les brèches de celle de 2004 et qui supprimera les peines de prison et les substituer par des amendes. Pour les entreprises elles seront sous forme de pourcentage du Chiffre d’Affaire. Et pour les personnes physiques ça sera sous forme d’un montant à payer à la Recette des Finances. Par ailleurs les personnes physiques ayant déjà installé des caméras de surveillances dans leur domicile sont appelées à contacter l’Instance pour déclarer ces caméras. L’Instance espère pouvoir déposer le projet de loi au Parlement avec la loi des Finances 2016.
«La Tunisie était parmi les premiers pays à déclarer le respect des données personnelles dans sa constitution de 1959. Et pourtant, aujourd’hui, l’Union Européenne interdit d’héberger ou de traiter les données personnelles de ses citoyens en Tunisie car on ne donne pas de garantis sur leur respect. Et pourtant ils n’attendent que ça pour nous faire confiance», a-t-il regretté.
Entre temps, les entreprises et les personnes physiques sont appelées à régulariser leur situation auprès de l’Instance en se rendant sur ce lien. Pour consulter la présentation de M. Gaddes, elle est disponible sur ce lien.
Welid Naffati
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