Dans ce 42ème épisode de DigiClub, nous avons invité Zied Saghari qui est le gérant de Webhost, un bureau tunisien d’enregistrement des noms de domaines et d’hébergement de sites Internet en Tunisie. Il est également membre de la chambre syndicale des sociétés de services et d’ingénierie informatique Infotica. Il est venu expliquer le verdict de l’Instance Nationale de Protection des Données Personnelles (INPDP) ainsi que sa plainte auprès du Conseil de la Concurrence demandant 50 millions de dinars de dommages et intérêts.
La raison de tout cet acharnement ? «Comment se fait-il que les données des Tunisiens sont transférées et traitées à l’étranger sans leur consentement ?», a-t-il déclaré au micro de DigiClub. Le gérant de Webhost a par la suite pris l’exemple des sites d’ONG et organisations suspectés de blanchiment d’argent et pouvant être l’objet d’investigations. D’après Zied Saghari, vu que les données sont hébergées ailleurs qu’en Tunisie, il est difficile à la Brigade Anti terroriste de faire des descentes pour récupérer et confisquer le contenu du serveur si besoin est.
C’est en se basant sur la loi organique de l’INPDP que Zied Saghari a pu obtenir gain de cause en transférant la décision de l’instance au Procureur de la République le 24 juillet 2017 stipulant l’emprisonnement d’un an et de 5 mille dinars d’amende contre le représentant légal d’OVH en Tunisie pour «traitement sans autorisation des données personnelles».
Il a également affirmé que le 21 aout dernier, le verdict du tribunal de première instance de Tunis a été transféré à la garde nationale de l’Aouina. «Nous avons notifié par huissier notaire, à la date du 2 aout 2017, le bureau d’OVH en Tunisie. La société a été appelée à mettre fin au transfert des données des Tunisiens en dehors du pays. Les salariés du bureau peuvent eux aussi, écoper de 1 an de prison et 5 mille DT d’amende».
Le gérant de Webhost a, par ailleurs, précisé qu’une plainte a été déposé auprès du Conseil de la concurrence via laquelle il a réclamé 50 millions de dinars de dommages et intérêts pour concurrence déloyale. Il a, par la même occasion, indiqué qu’un dossier de malversation a été présenté à l’instance nationale de la lutte contre la corruption.
Concernant la qualité de service que propose OVH (dont les Data Center sont essentiellement basés en France) et qui incite beaucoup de webmasters et entreprises à souscrire à un abonnement, Zied Saghari a appuyé l’existence «d’hébergeurs tunisiens, en Tunisie, qui ont des prix plus attractifs et avec une qualité de service optimale».
Et au sujet du problème de certification de qualité des Data Centers tunisiens, qui ne peuvent atteindre le niveau Tier 4 à cause de la monopolisation de l’électricité par la Steg qu’il n’y a pas de second fournisseur d’électricité dans le pays à cause du monopole de la Steg, Zied Saghari a affirmé que les sites doivent être tout le temps opérationnels et que «dans les Data Centers tunisiens, le service est disponible à 99,99% car ils ont des générateurs électriques qui peuvent tenir en cas de coupure d’électricité».
Après la publication du podcast sur SoundCloud, le président de l’INDPD, Chawki Gaddes, a réagit sur Facebook en déclarant : «Apparemment la motivation du transfert du dossier d’OVH au juge n’est pas connue. C’est qu’ils réalisent le transfert de données sans autorisation de l’Instance mais en plus sans en informer les personnes qui hébergent les données chez eux et sans obtenir leur consentement. Là est le problème, mais il est évident que des données hébergées en France, pays protecteur ne posent pas, de problème en soi sauf quand ces données sont sensibles ou touchent à la sécurité nationale».
Donc en clair, il suffit qu’OVH déclare le traitement des données personnelles auprès de l’instance pour obtenir l’autorisation et puis alerte ses abonnés de l’hébergement de leur données à l’étranger pour régulariser sa situation.
Nous avons contacté OVH Tunisie samedi dernier via la hotline puis par mail pour demander des éclaircissements sur ce sujet et avoir une réponse sur cette affaire. Ce n’est que lundi après midi que le service client d’OVH Tunisie nous a mis en contact, par mail, avec leur avocat, Maitre Mohamed Mejri.
Malgré nos relances par mail et puis par téléphone (le service client d’OVH est revenu vers nous mardi 12 septembre avec le numéro de téléphone portable de Maitre Mejri), l’avocat d’OVH n’a pas encore donné signe de vie jusqu’à l’écriture de ces lignes.
Vous pouvez écouter l’épisode 42 de DigiClub sur SoundCloud et iTunes.
Walid Naffati