L'actuTHD

Tunisie : Facebook, un danger pour la démocratie ?

«Facebook en Tunisie, c’est la contre-révolution». C’est ainsi que le site Slateafrique.com a titré son article paru le 19 août dernier. Bien que la Tunisie doive beaucoup au réseau social de Mark Zuckerberg, Facebook a tout de même perdu beaucoup de son aura depuis la révolution tunisienne. La raison de ce désenchantement ? La désinformation.

Après avoir servi d’outil anti-propagande sous Ben Ali, facebook est devenu aujourd’hui un site où les rumeurs les plus folles circulent. Pire : les tentatives de manipulation de l’opinion publique à coup de photos retouchées/vidéos montées se comptent par centaines. La bonne information se trouve ainsi noyée dans un déluge d’intox.

Les jeunes facebookeurs, souvent immatures et politiquement incultes, tombent alors dans le piège et deviennent souvent le relais de ces rumeurs grâce au bouton ‘partager’.

La source de ces intox ? Très souvent les pages fan sur facebook. Quelques-unes d’entre elles sont carrément devenues de vraies usines de fabrication d’intox. Les administrateurs de ces pages font parfois preuve d’une ingéniosité débordante pour créer une polémique en déformant la réalité grâce à la théorie du complot ; quittes à la monter de toute pièce…

Course à l’audience oblige, ces polémiques, généralement sous format photo/vidéo avec le nom de la page incrusté dessus, ont pour but de drainer plus de fans. Plus d’adhérents sur la page = plus d’argent dans les poches des son administrateur.

Se sucrer sur le dos des Internautes

Ce n’est un secret pour personne. Facebook en Tunisie est devenu un business. Les fans ? Ca se vend et ça s’achète. Plus une page est populaire, plus son cachet sera élevé. Comment ? En diffusant un lien ou une info sponsorisée. Et tanpis si ce genre d’affaires se conclut en dessous de table à l’insu des fans. Sur facebook, la transparence et la déontologie, on ne connaît pas !

Les partis politiques l’ont d’ailleurs compris. Aidés par l’anonymat dont on peut jouir sur Internet et sur facebook en particulier (comprenez : avec de faux profils), ces admins mettent alors à la disposition de tel ou tel parti leur page pour y diffuser, comme bon leur semble, le message qu’ils souhaitent faire parvenir au Tunisien. Souvent sous forme d’information mettant en valeur le parti (ou dénigrant un autre). Quant au paiement, il se fait en liquide et en cachette.

Ceci explique également la guerre qui fait rage actuellement entre les pages facebook ces jours-ci. Les admins surfant sur la vague de la révolution pour se sucrer sur le dos du pauvre internaute tunisien, ne ménagent aucun effort pour casser leurs concurrents à coup de diffamation, captures d’écran truquées et autres campagnes de dénigrement.

Récompense de 2000 dinars pour pirater une page facebook

Et gare à celui qui osera les contredire ou osera dévoiler le dessous de leur commerce. La vengeance peut les conduire jusqu’à l’incitation au piratage de leur compte. Le dernier exemple en date ? La page «Kanet Ettanbir» qui a fait appel le 30 août dernier au piratage de la page «Wazir Dhaght Eddam Wal Sokkar» contre une récompense de 2000 dinars (voir capture d’écran ici).

En mai dernier et sur ces mêmes colonnes, nous avons exposé le point de vue d’un facebookeur notoire : M. Riadh El Hammi. Il a déclaré que l’intox est «une solution qui peut s’avérer efficace, pour amener le gouvernement vers une transparence, la plus grande possible, ainsi qu’à mieux communiquer avec le peuple. Les analyses conspirationnistes, aussi fausses soient-elles, auront le mérite de faire éclater la vérité et d’obliger le gouvernement et les partis à se justifier et à livrer une partie des informations qu’attend le peuple».

Quelques mois plus tard, force est de constater que facebook n’est plus un outil de pression sur le gouvernement et les partis politiques, mais plutôt un marigot de «commerçants conspirationnistes». Où le nivellement par le bas prend le dessus sur les discussions constructives.

De ce fait, peut-on donc aller jusqu’à dire que Facebook représente désormais un vrai danger pour la démocratie en Tunisie ?

Welid Naffati

Laissez votre commentaire sur le forum

A lire également :

Tunisie : Rumeurs et désinformation sur facebook, un mal nécessaire ?

Ch9alek.com, le site communautaire tunisien anti-rumeur sur facebook

Facebook Comments

Plus Populaires

To Top